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Voltaire
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François-Marie Arouet dit Voltaire (1724 ou 1725), d'après Nicolas de Largillierre, exposé au château de Versailles.
Nom de naissance François-Marie Arouet
Alias
Voltaire
Naissance
Paris, Drapeau du royaume de France : entièrement blanc Royaume de France
Décès (à 83 ans)
Paris, Drapeau du royaume de France : entièrement blanc Royaume de France
Activité principale
Philosophe
Conteur
Poète
Dramaturge
Historien
Auteur
Langue d'écriture Français
Mouvement Philosophes
Genres
conte, théâtre, poésie, histoire, pamphlet, contes philosophiques
Adjectifs dérivés « voltairien »

?uvres principales

  • Lettres philosophiques (1734)
  • Zadig ou la Destinée (1748)
  • Essai sur les m?urs (1756)
  • Candide ou l'Optimisme (1759)
  • Traité sur la tolérance (1763)
  • Dictionnaire philosophique (1764)
  • L'Ingénu (1767)

Compléments

  • Intervenu dans différentes affaires judiciaires dont l'affaire Calas (1762), l'affaire Sirven (1764) et l'affaire du chevalier de La Barre (1766)
  • Panthéonisation en 1791

Voltaire, de son vrai nom François-Marie Arouet, né le à Paris où il y meurt le , est un écrivain et philosophe français, jouissant de son vivant d'une célébrité internationale et considéré aujourd'hui comme figure emblématique et centrale des Lumières.

Féru d'arts et de sciences, ami et collaborateur des encyclopédistes, Voltaire marque son époque par sa production littéraire et ses engagements politiques. Son influence sur les classes éduquées est considérable dans les décennies qui précèdent la Révolution française et tout au long du XIX siècle, en particulier dans les milieux bourgeois anticléricaux.

Adversaire implacable des religions révélées, mais déiste ou théiste, il dénonce dans son Dictionnaire philosophique le fanatisme religieux de toutes les époques, tant en France que dans d'autres pays. Mettant sa notoriété au service des victimes de l'intolérance religieuse ou de l'arbitraire, il prend position dans des affaires qu'il a rendues célèbres : les affaires Calas, Sirven, celles du chevalier de La Barre et du comte de Lally-Tollendal.

Partisan d'une monarchie modérée et libérale éclairée par les « philosophes », il a pour modèle le système britannique de gouvernement issu de la révolution de 1688, qu'il a pu observer lui-même lors de son séjour anglais de 1726 à 1728. Il croit un moment trouver dans les « despotes éclairés » (Frédéric de Prusse et Catherine de Russie) des princes modèles. Il est en revanche méfiant à l'égard du régime républicain, à la différence de Rousseau, citoyen de la république de Genève.

Pour le XVIII siècle, Voltaire est avant tout poète. On le désigne comme « l'auteur de La Henriade » (du nom de son poème épique à la gloire d'Henri IV), et ses tragédies (ou « poèmes dramatiques ») assurent sa renommée littéraire à l'égal d'un Racine ou d'un Corneille : ?dipe, sa première pièce, est un triomphe sous la Régence ; Zaïre est certainement le plus grand succès de théâtre de son siècle. De nos jours, ce sont plutôt ses contes philosophiques qui sont retenus par la mémoire scolaire : Candide ou l'Optimisme au premier chef, mais également Zadig, Micromégas, L'Ingénu ou encore La Princesse de Babylone. Épistolier infatigable, sa correspondance monumentale est estimée à quarante mille lettres, dont quinze mille nous sont connues.

Également historien, titulaire à partir de 1746 d'une charge officielle d'historiographe du roi, il est l'auteur dans ce domaine d'une ?uvre importante qui comprend notamment l'Histoire de Charles XII, Le Siècle de Louis XIV, le Précis du siècle de Louis XV, et l'Essai sur les m?urs, ouvrages comptant parmi les premiers essais historiques modernes. Sa philosophie de l'histoire fait de lui un précurseur du déterminisme historique du XIX siècle et de l'histoire culturelle au XX siècle.

Anglomane, à son retour de Londres Voltaire diffuse dans ses Lettres philosophiques des idées alors méconnues en France : le système de l'attraction universelle de Newton, l'empirisme de Locke, mais aussi le théâtre de Shakespeare, au sujet duquel il se montre ambivalent.

Tout au long de sa vie, Voltaire fréquente les grands de ce monde et les monarques, mais se retrouve souvent aux prises avec les autorités politiques, ce qui le conduit à la Bastille à deux reprises dans sa jeunesse, et par la suite à une série d'exils : d'abord l'Angleterre, ensuite dans la commune de Cirey auprès d'Émilie du Châtelet, puis la cour de Prusse où il se brouille avec Frédéric II avant de fuir Berlin en 1753. Après plusieurs mois d'errance, interdit de rentrer à Paris, il se réfugie aux Délices sur le territoire de Genève, puis acquiert en 1759 le domaine de Ferney, à la frontière entre le royaume de France et la république de Genève. Revenu à Paris en 1778, après une absence de près de vingt-huit ans, il y est ovationné par ses admirateurs et y meurt quelques semaines plus tard à 83 ans.

Voltaire aime le confort, les plaisirs de la table et de la conversation qu'il considère, avec le théâtre, comme l'une des formes les plus abouties de la vie en société. Il acquiert une fortune considérable dans des opérations spéculatives, surtout la vente d'armes, et dans la vente de ses ouvrages, ce qui lui permet de s'installer en 1759 au château de Ferney et d'y vivre sur un grand pied, tenant table et porte ouvertes. Le pèlerinage à Ferney fait partie en 1770-1775 du périple de formation des classes supérieures européennes sympathisant avec le parti philosophique. Investissant ses capitaux, il fait du village misérable de Ferney une petite ville prospère. Généreux, d'humeur gaie, il est néanmoins chicanier et parfois féroce et mesquin avec ses adversaires comme Jean-Jacques Rousseau, Crébillon ou Lefranc de Pompignan.

Les révolutionnaires de 1789, partisans de la monarchie constitutionnelle, voient en lui un précurseur, plus qu'en Rousseau, de sorte qu'il est panthéonisé en 1791, le deuxième après Mirabeau. À l'initiative du marquis de Villette qui l'a hébergé durant son séjour à Paris, le « quai des Théatins » où l'écrivain est mort est rebaptisé « quai Voltaire ». Sa popularité est moindre auprès du gouvernement montagnard de 1793-1794 : Robespierre étant un admirateur de Rousseau.

Il est célébré par la III République : dès 1870, à Paris, un boulevard, une impasse et une place portent son nom. Sa personne et ses combats ont alimenté, au XIX siècle, les passions antagonistes des adversaires et des défenseurs de la laïcité de l'État et de l'école publique, et, au-delà, de l'esprit des Lumières.


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  1. ? Antoine Lilti, « L'héritage des Lumières », Lumières, vol. 1, n 35,‎ , p. 149?158 (ISSN 1762-4630, DOI 10.3917/lumi.035.0149, lire en ligne, consulté le )
  2. ? René Pomeau, La religion de Voltaire, Nizet, , 547 p. (ISBN 978-2-7078-0331-3), p. 428 et suivantes
  3. ? « LETTRES PHILOSOPHIQUES », dans ?uvres complètes de Voltaire (Complete Works of Voltaire) 6B, Liverpool University Press, , 1?314 p. (ISBN 978-1-83764-120-8, lire en ligne)
  4. ? Voltaire, « Préface », dans Lettres choisies, édition de Nicholas Cronk, , p. 7.
  5. ? Essai sur les m?urs et l'esprit des nations, édition de René Pomeau, Classiques Garnier, 2020, tome I, p. XXVIII-XXIX.
  6. ? Claude J. Nordmann, « Anglomanie et anglophobie en France au XVIIIe siècle », Revue du Nord, vol. 66, n 261,‎ , p. 789 (ISSN 0035-2624, DOI 10.3406/rnord.1984.4047, lire en ligne, consulté le )
  7. ? Graham Gargett, Rene Pomeau et Christiane Mervaud, « Voltaire en son temps. Vol. III: De la Cour au jardin: 1750-1759 », The Modern Language Review, vol. 89, n 4,‎ , p. 1006 (ISSN 0026-7937, DOI 10.2307/3733946, lire en ligne, consulté le )
  8. ? Qui ne fait pas encore partie des cantons suisses confédérés.
  9. ? Dans Étude sur la vie et le théâtre de Crébillon (p. XXXIII), Maurice Dutrait évoque les « mesquineries » et les « fourberies chez un aussi grand personnage que Voltaire » ; il rappelle le jugement de Saint-Beuve sur les « misères » de cet écrivain qu'il admire, et cite le chevalier du Alleurs à ce sujet : « Le caractère de Voltaire dégoûtera toujours de son talent ».
  10. ? Devenue depuis la place Léon-Blum.

Biographie

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Débuts (1694-1733)

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Origines : naissance et filiation contestée

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François-Marie Arouet est né officiellement le à Paris et a été baptisé le lendemain à l'église de Saint-André-des-Arts. Il est le deuxième fils de François Arouet, notaire au Châtelet depuis 1675, marié le à Saint-Germain-l'Auxerrois avec Marie-Marguerite d'Aumart, fille d'un greffier criminel au Parlement. Le couple a cinq enfants dont trois atteignent l'âge adulte :

Le père revend en 1696 sa charge de notaire pour acquérir celle de conseiller du roi, receveur des épices à la Chambre des comptes. Voltaire perd sa mère à l'âge de sept ans.

Cependant, Voltaire a plusieurs fois affirmé qu'il était né le à Châtenay-Malabry, où son père avait une propriété, le château de la Petite Roseraie. Ce fait semble confirmé par la personne devenue propriétaire du château, la comtesse de Boigne, ainsi qu'elle l'écrit dans ses mémoires : « La naissance de Voltaire dans cette maison lui donne prétention à quelque célébrité ». Il a contesté aussi sa filiation paternelle, persuadé que son vrai père était un certain Roquebrune : « Je crois aussi certain que d'Alembert est le fils de Fontenelle, comme il est sûr que je le suis de Roquebrune ». Voltaire prétendit que l'honneur de sa mère consistait à avoir préféré un homme d'esprit comme était Roquebrune, « mousquetaire, officier, auteur et homme d'esprit », à son père, le notaire Arouet dont Roquebrune était le client, car Arouet était, selon Voltaire, un homme très commun. Le baptême à Paris aurait été retardé du fait de la naissance illégitime et du peu d'espoir de survie de l'enfant. Aucune certitude n'existe sinon que l'idée d'une naissance illégitime et d'un lien de sang avec la noblesse d'épée ne déplaisait pas à Voltaire.

Du côté paternel, les Arouet sont originaires d'un petit village du nord du Poitou, Saint-Loup-sur-Thouet, près d'Airvault, où ils exercent aux XV et XVI siècles une activité de marchands tanneurs, qui enrichit l'aïeul de Voltaire, Helenus Arouet (1569-1625), propriétaire de la seigneurie de Puy-Terrois, acquéreur en 1612 pour 4 000 livres tournois de « la maison noble terre et seigneurie et métairie de la Routte » à Saint-Loup, qu'il revend en 1615. Le premier Arouet à quitter sa province s'installe à Paris en 1625 où il ouvre une boutique de marchand de draps et de soie. Il épouse la fille d'un riche marchand drapier et s'enrichit suffisamment pour acheter en 1675 pour son fils, François, le père de Voltaire, une charge anoblissante de notaire au Châtelet, assurant à son titulaire l'accès à la petite noblesse de robe. Le père de Voltaire, travailleur austère et probe aux relations importantes, arrondit encore la fortune familiale en épousant le la fille d'un greffier criminel au Parlement.

Études chez les Jésuites (1704-1711)

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À la différence de son frère aîné qui étudie chez les jansénistes, François-Marie entre à dix ans comme interne (pour un coût de 400 puis 500 livres par an) au collège Louis-le-Grand, tenu par les Jésuites, et y reste sept ans. Les jésuites enseignent les langues classiques et la rhétorique mais, dans la ligne de leur Ratio Studiorum, veulent avant tout former des hommes du monde et initient leurs élèves aux arts de société : joutes oratoires, plaidoyers, concours de versification et théâtre. Un spectacle théâtral, le plus souvent en latin où sont par principe exclues les scènes d'amour, les rôles de femmes étant joués par des hommes, est donné chaque fin d'année lors de la distribution des prix.

Arouet est un élève brillant, vite célèbre par sa facilité à versifier : sa toute première publication est son Ode sur sainte Geneviève (1709). Imprimée par les Pères, cette ode est répandue hors les murs de Louis-le-Grand (au grand dam du Voltaire adulte). Le tout jeune Arouet apprend au collège Louis-le-Grand à s'adresser d'égal à égal aux fils de puissants personnages et tisse de précieux liens d'amitié qui lui seront très utiles toute sa vie : entre bien d'autres, les frères d'Argenson, René-Louis et Marc-Pierre, futurs ministres de Louis XV, et le futur duc de Richelieu. Bien que très critique envers la religion en général et les ecclésiastiques en particulier, il garde toute sa vie une grande vénération pour son professeur jésuite Charles Porée. Voltaire écrit en 1746 : « Rien n'effacera dans mon c?ur la mémoire du père Porée, qui est également cher à tous ceux qui ont étudié sous lui. Jamais homme ne rendit l'étude et la vertu plus aimables. Les heures de ses leçons étaient pour nous des heures délicieuses ; et j'aurais voulu qu'il eût été établi dans Paris, comme dans Athènes, qu'on pût assister à de telles leçons ; je serais revenu souvent les entendre ».

Débuts comme homme de lettres et premières provocations (1711-1718)

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Le Temple, détail du plan de Turgot, 1739. Le palais du grand prieur (à droite de la porte d'entrée) réunit une société libertine que fréquente assidûment Arouet à la sortie du collège.

Arouet quitte le collège en 1711 à dix-sept ans et annonce à son père qu'il veut être homme de lettres, et non avocat ou titulaire d'une charge de conseiller au Parlement, investissement pourtant considérable que ce dernier est prêt à faire pour lui. Devant l'opposition paternelle, il s'inscrit à l'école de droit et fréquente la société du Temple, qui réunit dans l'hôtel de Philippe de Vendôme, des membres de la haute noblesse et des poètes (dont Chaulieu), épicuriens lettrés connus pour leur esprit, leur libertinage et leur scepticisme. L'abbé de Châteauneuf, son parrain, qui y avait ses habitudes, l'avait présenté dès 1708. En leur compagnie, il se persuade qu'il est né grand seigneur libertin et n'a rien à voir avec les Arouet et les gens du commun. C'est aussi pour lui une école de poésie ; il va ainsi y apprendre à faire des vers « légers, rapides, piquants, nourris de référence antiques, libres de ton jusqu'à la grivoiserie, plaisantant sans retenue sur la religion et la monarchie ».

Son père l'éloigne un moment de ce milieu en l'envoyant à Caen, puis en le confiant au frère de son parrain, le marquis de Châteauneuf, qui vient d'être nommé ambassadeur à La Haye et accepte de faire de lui son secrétaire privé. Mais son éloignement ne dure pas. À Noël 1713, il est de retour, chassé de son poste et des Pays-Bas pour cause de relations tapageuses avec Olympe du Noyer, la fille de Anne-Marguerite Petit du Noyer. Furieux, son père veut l'envoyer en Amérique mais finit par le placer dans l'étude d'un magistrat parisien. Il est sauvé par un ancien client d'Arouet, lettré et fort riche, M. de Caumartin, marquis de Saint-Ange, qui le convainc de lui confier son fils pour tester le talent poétique du jeune rebelle. Arouet fils passe ainsi des vacances au château de Saint-Ange près de Fontainebleau à lire, à écrire et à écouter les récits de son hôte qui lui serviront pour La Henriade et Le Siècle de Louis XIV.

En 1714, il perd de peu le prix de poésie de l'Académie française, qui est décerné à l'abbé Juillard du Jarry de Bussac en Saintonge, pour sa poésie Le V?u de Louis XIII. Il publie alors anonymement des invectives à l'égard de l'abbé dans une lettre à M. D***, au sujet des prix de poésie donné par l'Académie française.

Le château de Sceaux. La duchesse du Maine y tient une cour royale et exige de ses hôtes des vers sur tout et sur rien. À ces jeux, Arouet est de toute première force.

En 1715, alors que débute la Régence, Arouet a 21 ans, et se retrouve dans le camp des ennemis du Régent. Invité au château de Sceaux, centre d'opposition le plus actif au nouveau pouvoir, où la duchesse du Maine, mariée au duc du Maine, bâtard légitimé de Louis XIV, tient une cour brillante, il ne peut s'empêcher de faire des vers injurieux sur les relations amoureuses du Régent ou de sa fille, la duchesse de Berry, qui vient d'accoucher clandestinement.

Le , il est exilé à Tulle. Son père use de son influence auprès de ses anciens clients pour fléchir le Régent qui remplace Tulle par Sully-sur-Loire, où Arouet fils s'installe dans le château du jeune duc de Sully, une connaissance du Temple, qui vit avec son entourage dans une succession de bals, de festins et de spectacles divers. À l'approche de l'hiver, il sollicite la grâce du Régent qui la lui accorde. Le jeune Arouet alors recommence sa vie turbulente à Saint-Ange et à Sceaux, profitant de l'hospitalité des nantis et du confort de leurs châteaux. Mais, pris par l'ambiance, quelques semaines plus tard, il récidive. S'étant lié d'amitié avec un certain Beauregard, en réalité un indicateur de la police chargé de le faire parler, il lui confie être l'auteur de nouveaux ouvrages de vers satiriques contre le Régent et sa fille. Le , il est envoyé à la Bastille par lettre de cachet. Arouet a alors 23 ans et il restera embastillé durant onze mois.

Premiers succès littéraires et retour à la Bastille (1718-1726)

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Voltaire devient célèbre à 24 ans grâce au succès de sa tragédie ?dipe (1718).
« Il fit croire, des Enfers, Racine revenu » écrit le prince de Conti.

À sa première sortie de la prison de la Bastille, conscient d'avoir jusque-là gaspillé son temps et son talent, il veut donner un nouveau cours à sa vie, et devenir célèbre dans les genres les plus nobles de la littérature de son époque : la tragédie et la poésie épique.

Pour rompre avec son passé, et notamment avec sa famille, afin d'effacer un patronyme aux consonances vulgaires et équivoques, il se crée un nom euphonique : Voltaire. On ne sait pas à partir de quels éléments il a élaboré ce pseudonyme. De nombreuses hypothèses ont été avancées, toutes vraisemblables mais jamais prouvées : inversion des syllabes de la petite ville d'Airvault (proche du village dont est originaire la famille Arouet) ; anagramme d'Arouet l.j. (le jeune) ; ou évocation de la ville de Volterra en Toscane : organisée en république de Volterra dans la ligue Guelfe, elle fut fière et rebelle et s'opposa à l'autorité des évêques. Il a été dit que Voltaire, en voyage et malade, y fut si bien soigné qu'il en fut reconnaissant ; l'hypothèse est belle mais contestée par Chaudon.

Le , la première pièce écrite sous le pseudonyme de Voltaire, ?dipe, obtient un immense succès. Le public apprécie ses vers en forme de maximes et ses allusions impertinentes au roi défunt et à la religion. Ses talents de poète mondain triomphent dans les salons et les châteaux. Il devient l'intime des Villars, qui le reçoivent dans leur château de Vaux, et l'amant de Madame de Bernières, épouse du président à mortier du parlement de Rouen.

Après l'échec d'une deuxième tragédie, Artémire, il connaît un nouveau succès en 1723 avec La Henriade, poème épique de 4 300 alexandrins se référant aux modèles classiques (Iliade d'Homère, Énéide de Virgile) dont le sujet est le siège de Paris par Henri IV et qui trace le portrait d'un souverain idéal, ennemi de tous les fanatismes : vendu à 4 000 exemplaires en quelques semaines, ce poème connaîtra soixante éditions successives du vivant de son auteur. Il y développe notamment l'épisode du panache blanc d'Henri IV. Pour ses contemporains, Voltaire restera longtemps l'auteur de La Henriade, le « Virgile français », le premier à avoir écrit une épopée nationale, mais le mouvement romantique du XIX siècle la reléguera dans l'oubli.

En , il subit une humiliation qui le marquera toute sa vie. Le chevalier Guy-Auguste de Rohan-Chabot, jeune gentilhomme arrogant, appartenant à l'une des plus illustres familles du royaume, l'apostrophe à la Comédie-Française : « Monsieur de Voltaire, Monsieur Arouet, comment vous appelez-vous ? » ; Voltaire réplique alors : « Voltaire ! Je commence mon nom et vous finissez le vôtre ». Quelques jours plus tard, on le fait appeler alors qu'il dîne chez son ami le duc de Sully. Dans la rue, il est frappé à coups de gourdin par les laquais du chevalier, qui surveille l'opération de son carrosse. Blessé et humilié, Voltaire veut obtenir réparation, mais aucun de ses amis aristocrates ne prend son parti. Le duc de Sully refuse ainsi de l'accompagner chez le commissaire de police pour appuyer sa plainte. Il n'est pas question d'inquiéter un Rohan pour avoir fait rouer de coups un écrivain : « Nous serions bien malheureux si les poètes n'avaient pas d'épaules », dit un parent de Caumartin. Le prince de Conti note à propos de l'incident que les coups de bâtons « ont été bien reçus mais mal donnés ». Voltaire veut venger son honneur par les armes, mais son ardeur à vouloir se faire justice lui-même indispose tout le monde. Les Rohan obtiennent que l'on procède à l'arrestation de Voltaire, qui est conduit à la Bastille le . Il n'est libéré, deux semaines plus tard, qu'à la condition qu'il s'exile.

En Angleterre, « terre de Liberté » (1726-1728)

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Écrites en partie en Angleterre, les Lettres philosophiques sont « la première bombe lancée contre l'Ancien Régime » (Gustave Lanson). Elles vont faire à Paris en 1734 un énorme scandale et condamner leur auteur à l'exil.

Voltaire a 32 ans. Cette expérience va le marquer d'une empreinte indélébile. Il est profondément impressionné par l'esprit de liberté qu'il voit dans la société anglaise (ce qui ne l'empêche pas d'apercevoir les ombres du tableau, surtout vers la fin de son séjour). Alors qu'en France règnent les lettres de cachet, la loi d'Habeas corpus de 1679 (nul ne peut demeurer détenu sinon par décision d'un juge) et la Déclaration des droits de 1689 protègent les citoyens anglais contre le pouvoir du roi. L'Angleterre, cette « nation de philosophes », rend justice aux vraies grandeurs qui sont celles de l'esprit. Présent en 1727 aux obsèques solennelles de Newton à l'abbaye de Westminster, il fait la comparaison : à supposer que Descartes soit mort à Paris, on ne lui aurait certainement pas accordé d'être enseveli à Saint-Denis, auprès des sépultures royales. La réussite matérielle du peuple d'Angleterre suscite aussi son admiration. Il fait le lien avec le retard de la France dans le domaine économique et l'archaïsme de ses institutions.

Il ne lui faut que peu de temps pour acquérir une excellente maîtrise de l'anglais. En novembre 1726, il s'installe à Londres. Il rencontre des écrivains, des philosophes, des savants (physiciens, mathématiciens, naturalistes) et s'initie à des domaines de connaissance qu'il ignorait jusqu'ici. Son séjour en Angleterre lui donne l'occasion de découvrir Newton dont il n'aura de cesse de faire connaître l'?uvre. Ainsi s'esquisse la mutation de l'homme de lettres en « philosophe », qui le conduit à s'investir dans des genres jusqu'alors considérés comme peu prestigieux : l'histoire, l'essai politique et plus tard le roman. C'est en Angleterre qu'il commence à rédiger en anglais l'ouvrage où il expose ses observations sur l'Angleterre, qu'il fera paraître en 1733 à Londres sous le titre Letters Concerning the English Nation et dont la version française n'est autre que les Lettres philosophiques.

Il se rapproche de la cour de George I puis de George II et prépare une édition de La Henriade en souscription, accompagnée de deux essais en anglais. Cet ouvrage remporte un grand succès (343 souscripteurs) et renfloue ses finances. Une souscription analogue ouverte en France par son ami Thériot n'en rassemble que 80 et fera l'objet de nombreuses saisies de la police.

Retour d'Angleterre (1728-1733)

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À l'automne 1728, il est autorisé à rentrer en France pourvu qu'il se tienne éloigné de la capitale. L'affaire Rohan remonte à plus de trois ans. Voltaire procède précautionneusement, séjournant plusieurs mois à Dieppe où il se fait passer pour un Anglais. Il obtient en avril l'autorisation de venir à Paris, mais Versailles lui reste interdit.

À son retour d'Angleterre, il n'a que quelques économies qu'il s'emploie activement à faire fructifier. Selon certains historiens et son autobiographie, il gagne un capital important, sur une idée du mathématicien La Condamine, en participant à une loterie d'État mal conçue. Puis il part à Nancy spéculer sur des actions émises par le duc François III de Lorraine, qui introduit la franc-maçonnerie en Autriche, opération dans laquelle il aurait « triplé son or ». Il reçoit aussi en sa part de l'héritage paternel. Ces fonds vont être judicieusement placés dans le commerce, « les affaires de Barbarie », vente des blés d'Afrique du Nord vers l'Espagne et l'Italie où elle est plus lucrative qu'à Marseille et les « transactions de Cadix », échange de produits des colonies françaises contre l'or et l'argent du Pérou et du Mexique. En 1734, il confie ses capitaux aux frères Pâris dans leur entreprise de fournitures aux armées. Selon certains historiens, c'est Joseph Pâris qui a fait la fortune de Voltaire. Enfin, à partir de 1736, Voltaire va surtout prêter de l'argent à des grands personnages et des princes européens, prêts transformés en rentes viagères selon une pratique courante de l'époque (à lui d'actionner ses débiteurs, désinvoltes mais ayant du répondant, pour obtenir le paiement de ses rentes). « J'ai vu tant de gens de lettres pauvres et méprisés que j'ai conclu dès longtemps que je ne devais pas en augmenter le nombre ». Programme réalisé à son retour d'Angleterre.

En 1730, un incident, dont il se souviendra à l'heure de sa mort, le bouleverse et le scandalise. Il est auprès d'Adrienne Lecouvreur, une actrice qui a joué dans ses pièces et avec laquelle il a eu une liaison, lorsqu'elle meurt. Le prêtre de la paroisse de Saint-Sulpice lui refuse une sépulture (la France est alors le seul pays catholique où les comédiens sont frappés d'excommunication). Le cadavre doit être placé dans un fiacre jusqu'à un terrain vague à la limite de la ville où elle est enterrée sans aucun monument pour marquer sa tombe. Quelques mois plus tard meurt à Londres une comédienne, Mrs Oldfield, enterrée à Westminster Abbey. Là encore, Voltaire fait la comparaison.

Voltaire fait sa rentrée littéraire à Paris par le théâtre, en travaillant selon son habitude à plusieurs ?uvres en même temps. Sans beaucoup de succès avec Brutus, La mort de César et Ériphyle. Mais Zaïre en 1732 remporte un triomphe comparable à celui d'?dipe et est joué dans toute l'Europe (la 488 représentation a eu lieu en 1936).

Les Lettres philosophiques et l'Académie (1733-1749)

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Voltaire à 41 ans.
« Il est maigre, d'un tempérament sec. Il a la bile brulée, le visage décharné, l'air spirituel et caustique, les yeux étincelants et malins. Vif jusqu'à l'étourderie, c'est un ardent qui va et vient, qui vous éblouit et qui pétille. »
Émilie du Châtelet (1706-1749) à sa table de travail tenant un compas sur un cahier ouvert (portrait de Quentin de La Tour)

Depuis des mois, sa santé délabrée fait que Voltaire vit sans maîtresse. En 1733, il devient l'amant de M du Châtelet. Émilie du Châtelet a 27 ans, douze de moins que Voltaire. Fille de son ancien protecteur, le baron de Breteuil, elle décide pendant seize ans de l'orientation de sa vie, dans une situation quasi conjugale (son mari, un militaire appelé à parcourir l'Europe à la tête de son régiment, n'exige pas d'elle la fidélité, à condition que les apparences soient sauves, une règle que Voltaire « ami de la famille » sait respecter). Ils ont un enthousiasme commun pour l'étude et sous l'influence de son amie, Voltaire va se passionner pour les sciences. Il « apprend d'elle à penser », dit-il. Elle joue un rôle essentiel dans la métamorphose de l'homme de lettres en « philosophe ». Elle lui apprend la diplomatie, freine son ardeur désordonnée. Ils vont connaître dix années de bonheur et de vie commune. La passion se refroidit ensuite. Les infidélités sont réciproques (la nièce de Voltaire, M Denis, devient sa maîtresse fin 1745, secret bien gardé de son vivant ; Émilie du Châtelet s'éprend passionnément de Saint-Lambert en 1748), mais ils ne se sépareront pas pour autant, l'entente entre les deux esprits demeurant la plus forte. À sa mort, en 1749, elle ne sera jamais remplacée. M Denis, que Voltaire aimera tendrement, va régner sur son ménage (ce dont ne se souciait pas Émilie du Châtelet), mais elle ne sera jamais la confidente et la conseillère de ses travaux.

Première page de La Voltairomanie, ou Lettre d'un jeune avocat, en forme de mémoire de l'abbé Desfontaines, en représailles à son Préservatif ou Critique des observations sur les écrits modernes (1738).

Émilie est une véritable femme de sciences. L'étendue de ses connaissances en mathématiques et en physique en fait une exception dans le siècle. C'est aussi une femme du monde qui mène une vie mondaine assez frénétique en dehors de ses études. Elle aime l'amour (elle a déjà eu plusieurs amants, dont le duc de Richelieu ; elle devient, en 1734, la maîtresse de son professeur de mathématiques, Maupertuis, que lui a présenté Voltaire) et le jeu, où elle perd beaucoup d'argent. Elle cherche un homme à sa mesure pour asseoir sa réussite intellectuelle : Voltaire est un écrivain de tout premier plan, de réputation européenne, avide de réussite lui aussi.

1734 est l'année de la publication clandestine des Lettres philosophiques, le « manifeste des Lumières », grand reportage intellectuel et polémique sur la modernité anglaise, publié dans toute l'Europe à 20 000 exemplaires, selon l'estimation de René Pomeau, chiffre particulièrement élevé à l'époque. L'éloge de la « liberté et de la tolérance anglaises » est perçu à Paris comme une attaque contre le gouvernement et la religion. Le livre est condamné par le Parlement à majorité janséniste et brulé au bas du grand escalier du Palais. Une lettre de cachet est alors lancée contre Voltaire, et Émilie du Châtelet lui propose de se réfugier au château de Cirey, situé en Champagne. Un an plus tard, après une lettre de désaveu où il « proteste de sa soumission entière à la religion de ses pères », il sera autorisé à revenir à Paris si nécessaire, mais la lettre de cachet ne sera pas révoquée.

le Château de Cirey-sur-Blaise.

Pendant les dix années suivantes, passées pour l'essentiel au château de Cirey, Voltaire joue un double jeu : rassurer ses adversaires pour éviter la Bastille, tout en continuant son ?uvre philosophique pour gagner les hésitants. Tous les moyens sont bons : publications clandestines désavouées, manuscrits dont on fait savoir qu'il s'agit de fantaisies privées non destinées à la publication et qu'on lit aux amis et visiteurs qui en répandent les passages les plus féroces (exemple La Pucelle qui ridiculise Jeanne d'Arc). Son engagement est inséparable d'un combat antireligieux. Il considère l'intolérance religieuse comme responsable du retard de la France en matière d'organisation sociale.

Frontispice des Elémens de la philosophie de Neuton, 1738.

Voltaire restaure le château grâce à son argent et le fait agrandir. Il fait des expériences scientifiques dans le laboratoire d'Émilie pour le concours de l'Académie des sciences. Aidé par Émilie du Châtelet, il est l'un des premiers à vulgariser en France les idées de Newton sur la gravitation universelle en publiant les Éléments de la philosophie de Newton (1737). Il commence La Pucelle (pour s'amuser dit-il) et Le Siècle de Louis XIV (pour convaincre son amie qui n'aime pas l'histoire), prépare l'Essai sur les m?urs, histoire générale des civilisations, où il dénombre les horreurs engendrées par le fanatisme. Il enrichit son ?uvre théâtrale avec Alzire (qui fait « perdre la respiration » au jeune Rousseau) et Mérope qui est un grand succès. Un poème, où il fait l'apologie du luxe (« Le superflu, chose très nécessaire »), Le Mondain, et évoque la vie d'Adam, scandalise à Paris les milieux jansénistes. Prévenu, il s'enfuit en Hollande par crainte des représailles. En 1742, sa pièce Le Fanatisme ou Mahomet le prophète est applaudie à Paris. Mais les jansénistes considèrent que Voltaire, sous prétexte d'islam, attaque en réalité le christianisme. Ils obtiennent du pouvoir royal plutôt réticent l'interdiction de fait de la pièce, que Voltaire, toujours sous le coup de la lettre de cachet de 1734, doit retirer après la 3 représentation. Elle ne sera reprise qu'en 1751. Voltaire apparaît de plus en plus comme un adversaire de la religion.

En 1736, Voltaire reçoit la première lettre du futur roi de Prusse Frédéric II, initié à la franc-maçonnerie en 1738. Commence alors une correspondance qui durera jusqu'à la mort de Voltaire (interrompue en 1754, après l'avanie de Francfort, elle reprendra en 1757). « Continuez, Monsieur, à éclairer le monde. Le flambeau de la vérité ne pouvait être confié à de meilleures mains », lui écrit Frédéric II qui veut l'attacher à sa cour par tous les moyens. Voltaire lui rend plusieurs fois visite, mais refuse de s'installer à Berlin du vivant de M du Châtelet qui se méfie du roi-philosophe.

Pour cette raison peut-être, Madame du Châtelet pousse Voltaire à chercher un retour en grâce auprès de Louis XV. De son côté, Voltaire ne conçoit d'avenir pour ses idées qu'avec l'accord du roi. En 1744, il est aidé par la conjoncture : le nouveau ministre des Affaires étrangères est d'Argenson, son ancien condisciple de Louis-le-Grand, et surtout il a le soutien de la nouvelle favorite Madame de Pompadour, filleule du frère de son associé Joseph Pâris, l'homme le plus riche de France. Son amitié avec le roi de Prusse est un atout. Il se rêve en artisan d'une alliance entre les deux rois et accepte une mission diplomatique, qui échoue. Grâce à ses appuis, il obtient la place d'historiographe de France, le titre de « gentilhomme ordinaire de la chambre du roi » et les entrées de sa chambre. Dans le cadre de ses fonctions, il compose un poème lyrique, La Bataille de Fontenoy et un opéra, avec Rameau, à la gloire du roi. Mais Louis XV ne l'aime pas et Voltaire ne sera jamais un courtisan.

De même, la conquête de l'Académie française lui paraît « absolument nécessaire ». Il veut se protéger de ses adversaires et y faire rentrer ses amis (à sa mort, elle sera majoritairement voltairienne et aura à sa tête d'Alembert qui lui est tout dévoué). Après deux échecs et beaucoup d'hypocrisies (un éloge des Jésuites et le canular de la bénédiction papale), il réussit à se faire élire le , au fauteuil numéro 33.

La même année, Zadig, un petit livre publié clandestinement à Amsterdam est désavoué par Voltaire : « Je serais très fâché de passer pour l'auteur de Zadig qu'on ose accuser de contenir des dogmes téméraires contre notre sainte religion. » Outre ses aspects philosophiques, Zadig apparaît comme un bilan autocritique qu'établit Voltaire à 50 ans, estime Pierre Lepape. La gloire ne s'obtient qu'au prix du ridicule et de la honte du métier de courtisan, le bonheur est saccagé par les persécutions qu'il faut subir, l'amour est un échec, la science est une manière de se cacher l'absurdité de la vie. L'histoire de l'humanité est celle d'un cheminement de la conscience malgré les obstacles : ignorance, superstition, intolérance, injustice, déraison. Zadig est celui qui lutte contre cette obscurité de la conscience : « Son principal talent était de démêler la vérité, que tous les hommes cherchent à s'obscurcir ». En , M du Châtelet, enceinte de Saint-Lambert, officier de la cour du roi Stanislas et poète, meurt dans les jours qui suivent son accouchement.

À la mort de Madame du Châtelet, femme avec qui il croyait terminer ses jours malgré leurs querelles et infidélités réciproques, Voltaire est désemparé et souffre de dépression (« la seule vraie souffrance de ma vie », dira-t-il). Il a 54 ans. Il ne reste que six mois à Paris. L'hostilité de Louis XV et l'échec de sa tragédie Oreste le poussent à accepter les invitations réitérées de Frédéric II.

La maturité (1750-1768)

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Le voyage à Berlin (1750-1753)

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Frédéric II en 1745.
« Je redouble d'envie de vous revoir, c'est-à-dire de parler de littérature, et de m'instruire de choses que vous seul pouvez m'apprendre (Lettre du 20 janvier 1750 à Voltaire) »
Les soupers dans la salle de marbre du château de Sans-Souci (on reconnaît Voltaire parmi les invités).
« Le roi avait de l'esprit et en faisait avoir », dit Voltaire.

Il part en pour la cour de Prusse. Le , il est à Berlin. Magnifiquement logé dans l'appartement du maréchal de Saxe, il travaille deux heures par jour avec le roi qu'il aide à mettre au point ses ?uvres. Le soir, des soupers délicieux avec la petite cour très francisée de Potsdam où il retrouve Maupertuis, président de l'Académie des sciences de Berlin, La Mettrie qu'il déteste, d'Argens. Il a sa chambre au château de Sans-Souci et un appartement dans la ville au palais de la Résidence. En août, il reçoit la dignité de chambellan, avec l'ordre du Mérite.

Voltaire passe plus de deux ans et demi en Prusse (il y termine Le Siècle de Louis XIV et écrit Micromégas). Mais après l'euphorie des débuts, ses relations avec Frédéric se détériorent, les brouilles se font plus fréquentes, parfois provoquées par les imprudences de Voltaire (affaire Hirschel).

Un pamphlet de Voltaire contre Maupertuis (ce dernier avait commis, en tant que président de l'Académie des sciences, un abus de pouvoir contre l'ancien précepteur de M du Châtelet, König, académicien lui aussi) provoque la rupture. Le pamphlet, La Diatribe du docteur Akakia, est imprimé par Voltaire sans l'accord du roi et en utilisant une permission accordée pour un autre ouvrage. Se sentant berné, furieux que l'on attaque son Académie, Frédéric fait saisir les exemplaires qui sont brûlés sur la place publique par le bourreau. Voltaire demande son congé.

Il quitte la Prusse le avec la permission du roi. Il ne se dirige pas tout de suite vers la France, faisant des arrêts prolongés à Leipzig, Gotha et Kassel où il est fêté, mais à Francfort, ville libre d'Empire, Frédéric le fait arrêter le par son résident le baron von Freytag, pour récupérer un livre de poésies écrit par lui et donné à Voltaire, dont il craint que ce dernier ne fasse mauvais usage (Voltaire en fait dans son récit de l'événement « l'?uvre de poésie du roi mon maitre »). Pendant plus d'un mois, Voltaire, en compagnie de M Denis venue le rejoindre, est humilié, séquestré, menacé et rançonné dans une série de scènes absurdes et ubuesques. Enfin libéré, il peut quitter Francfort le .

Genève : à la frontière de la France (1753-1755)

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Le Souper des philosophes (Huber). Voltaire lève la main pour imposer le silence. À sa gauche Diderot, puis le père Adam, Condorcet, d'Alembert, l'abbé Maury et La Harpe. La scène se passe à Ferney en 1772. Elle est fictive, mais seul Diderot ne s'est jamais rendu à Ferney.

Jusqu'à la fin de l'année, il attend à Colmar la permission de revenir à Paris, mais le , l'interdiction d'approcher de la capitale lui est notifiée. Il se dirige alors, par Lyon, vers Genève. Il pense trouver un havre de liberté dans cette république calviniste de notables et de banquiers cultivés parmi lesquels il compte de nombreux admirateurs et partisans.

Grâce à son ami François Tronchin, Voltaire achète sous un prête-nom (les catholiques ne peuvent pas être propriétaires à Genève) la belle résidence des Délices et en loue une autre dans le canton de Vaud pour passer la saison d'hiver. Les Délices annoncent son château de Ferney-Voltaire, il embellit la maison, y mène grand train, reçoit beaucoup (la visite du grand homme, au c?ur de la propagande voltairienne, devient à la mode), donne en privé des pièces de théâtre (le théâtre est toujours interdit dans la ville de Calvin). Très vite, les pasteurs genevois lui « conseillent » de ne rien publier contre la religion tant qu'il habite parmi eux.

Le tremblement de terre et Candide (1755-1759)

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Il travaille aussi beaucoup : théâtre, préparation de Candide, sept volumes de l'Essai sur les m?urs et l'esprit des nations tiré à 7 000 exemplaires, Poème sur le désastre de Lisbonne, révision des dix premiers volumes de ses ?uvres complètes chez Gabriel Cramer, son nouvel éditeur, qui a un réseau de correspondants européens permettant de diffuser les livres interdits.

Voltaire collabore aussi à l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert (125 auteurs recensés). Ce grand dictionnaire vendu dans toute l'Europe (la souscription coûte une fortune) défend aussi la liberté de penser et d'écrire, la séparation des pouvoirs et attaque la monarchie de droit divin. Voltaire rédige une trentaine d'articles, mais il est en désaccord sur la tactique (« Je voudrais bien savoir quel mal peut faire un livre qui coûte cent écus. Jamais vingt volumes in-folio ne feront de révolution ; ce sont les petits livres portatifs à trente sous qui sont à craindre »). Il voudrait imposer sa marque, faire de l'Encyclopédie l'organe du combat antichrétien, l'imprimer hors de France, mais, s'il possède en d'Alembert un allié de poids, il ne peut gagner Diderot à ses vues.

Largement inspiré par Voltaire, l'article « Genève » de d'Alembert paru dans le volume VII en 1757 fait scandale auprès du clergé genevois.

En France, après l'attentat de Damiens contre Louis XV, une offensive antiphilosophique se déclenche : après le livre d'Helvétius, De l'Esprit, interdit en , l'Encyclopédie est interdite à son tour le , par décret royal.

Pour mieux assurer son indépendance et échapper aux tracasseries des pasteurs de Genève, Voltaire achète le château de Ferney (ainsi que le château de Tournay qui forme avec le précédent un vaste ensemble d'un seul tenant) et s'y installe en . Ferney est dans le Pays de Gex, en territoire français, mais loin de Versailles et à quatre kilomètres de la république genevoise où il peut trouver refuge et où se situe son éditeur Cramer et bon nombre de ses partisans dans les milieux dirigeants.

Château de Voltaire à Ferney.

Le Vignoble de la vérité (1759-1763)

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Ferney est la période la plus active de la vie de Voltaire. Il y réside vingt ans jusqu'à son retour à Paris. Il a 64 ans.

Voltaire est riche et en est fier : « Je suis né assez pauvre, j'ai fait toute ma vie un métier de gueux, de barbouilleur de papier, celui de Jean-Jacques Rousseau, et cependant me voilà maintenant avec deux châteaux, 70 000 livres de rente et 200 000 livres d'argent comptant », écrit-il à son banquier en 1761. Sa fortune lui permet de reconstruire le château, d'en embellir les abords, d'y construire un théâtre, de faire de son vivant du village misérable de Ferney une petite ville prospère et aussi de tenir table et porte ouvertes, jusqu'à ce que l'afflux de visiteurs et la fatigue l'obligent à restreindre l'accueil.

C'est la nièce et compagne de Voltaire, Madame Denis, qui reçoit en tant que maîtresse de maison. Lui-même ne se montre qu'aux repas, se réservant d'apparaître à l'improviste si cela lui convient, car il se ménage de longues heures de travail (« J'ai quelquefois 50 personnes à table. Je les laisse avec Mme Denis qui fait les honneurs, et je m'enferme »). Ses visiteurs, qui l'attendent impatiemment, sont en général frappés par le charme de sa conversation, la vivacité de son regard, sa maigreur, son accoutrement (habituellement Voltaire ne « s'habille » pas). Il aime conduire ses hôtes dans son jardin et leur faire admirer le paysage. Les grandes heures sont celles de son théâtre privé (« Rien n'anime plus la société, rien ne donne plus de grâce au corps et à l'esprit, rien ne forme plus le goût », dit-il). Installé à côté du château, il peut contenir 300 personnes. Voltaire et M Denis y jouent eux-mêmes leurs rôles préférés.

Lutte contre l'injustice : Calas, Sirven et La Barre (1761-1765)

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À partir de l'affaire Calas, le mot d'ordre « Écrasez l'Infâme » apparaît sous sa plume.

Le , Voltaire est informé que, par ordre du parlement de Toulouse, un vieux commerçant protestant, nommé Calas, vient d'être roué, puis étranglé et brûlé. Il aurait assassiné son fils qui voulait se convertir au catholicisme. Voltaire entend dire que Calas aurait été condamné sans preuves. Des témoignages le persuadent de son innocence. Convaincu qu'il s'agit d'une tragédie de l'intolérance, que les juges ont été influencés par ce qu'il considère comme le « fanatisme ambiant », il entreprend la réhabilitation du supplicié et réclame l'acquittement des autres membres de la famille Calas qui restent inculpés. Pendant trois ans, de 1762 à 1765, il mène une intense campagne : écrits, lettres, mettent en mouvement tout ce qui a de l'influence en France et en Europe. C'est à partir de l'affaire Calas que le mot d'ordre « Écrasez l'Infâme » (chez Voltaire, la religion, la superstition, le fanatisme et l'intolérance), abrégé à l'usage en Ecr.linf., apparaît dans sa correspondance à la fin de ses lettres. Il élève le débat par un Traité sur la tolérance (1763). Une sentence d'un parlement n'étant pas susceptible d'appel, le seul recours est le Conseil privé du roi. Seul Voltaire a assez de prestige pour saisir une telle instance. De Ferney, n'ayant que son écritoire et son papier, il parvient à faire casser l'arrêt du Parlement et à faire indemniser la famille.

Il réussit de même à faire réhabiliter Sirven, un autre protestant condamné par contumace le à être pendu, ainsi que sa femme, pour le meurtre de leur fille que l'on savait folle et que l'on trouva noyée dans un puits. On accusait son père et sa mère de l'avoir assassinée pour l'empêcher de se convertir. Les deux parents vont solliciter Voltaire qui obtient leur acquittement après un long procès.

Il intervient également dans l'affaire La Barre. À Abbeville, le , est découvert en pleine ville, sur le Pont-Neuf, un crucifix de bois mutilé. Une enquête est ouverte. Les soupçons se portent sur un groupe de jeunes gens qui se sont fait remarquer en ne se découvrant pas devant la procession du Saint-Sacrement, en chantant des chansons obscènes et en affectant de lire le Dictionnaire philosophique de Voltaire. Deux d'entre eux s'enfuient. Le chevalier de La Barre, âgé de 19 ans, est condamné à avoir la langue coupée, puis à être décapité et brûlé. Le Parlement de Paris confirme la sentence. L'exécution a lieu le . Le Dictionnaire philosophique est brûlé en même temps que le corps et la tête du condamné. Voltaire rédige l'exposé détaillé de l'affaire, fait ressortir le scandale, provoque un revirement de l'opinion. Le juge d'Abbeville est révoqué, les coïnculpés acquittés. « Ce sang innocent crie, et moi je crierai aussi ; et je crierai jusqu'à ma mort » écrit Voltaire à d'Argental.

Son engagement contre l'injustice va durer jusqu'à sa mort (réhabilitation posthume de Lally-Tollendal, affaires Morangiés, Monbailli, serfs du Mont-Jura). « Il faut dans cette vie combattre jusqu'au dernier moment », déclare-t-il en 1775.

Le Dictionnaire philosophique portatif (1764-1768)

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Le lever de Voltaire de Jean Huber (vers 1768-1772)
Voltaire enfile sa culotte en dictant une lettre.

À Ferney, Voltaire va s'affirmer comme le champion de la « philosophie », cette pensée des Lumières portée par de très nombreux individus ? mais dispersés et constamment engagés entre eux en d'âpres discussions. Sa production imprimée pendant ces années va être considérable. « J'écris pour agir », affirme-t-il. Il veut gagner ses lecteurs à la cause des Lumières. Il choisit pour sa propagande des ?uvres « utiles et courtes ». Contrairement à L'Encyclopédie, avec ses gros volumes facilement bloqués chez l'éditeur, il privilégie les brochures de quelques pages qui se dissimulent aisément, échappent aux perquisitions de la douane et de la police et se vendent pour quelques sous.

À Paris, il peut compter sur une équipe de fidèles, en premier lieu d'Alembert, futur secrétaire de l'Académie française, dont les relations mondaines et littéraires lui sont de précieux atouts, et qui n'hésite pas à le mettre en garde ou à corriger ses erreurs, mais aussi Grimm, D'Amilaville, M d'Épinay, Helvétius, Marmontel, M du Deffand, et aussi sur des appuis politiques comme Richelieu ou Choiseul.

Quand il s'installe à Ferney, la diffusion clandestine de Candide, son ouvrage le plus connu, a commencé. René Pomeau estime qu'il a dû se vendre en 1759 environ 20 000 Candide, chiffre énorme à une époque où L'Encyclopédie elle-même ne dépasse pas 4 000 exemplaires.

En France, le pouvoir et les milieux conservateurs ont lancé une campagne contre les idées du parti philosophique : interdiction de L'Encyclopédie, discours de Le Franc de Pompignan à l'Académie, comédie de Palissot contre les philosophes au Théâtre-Français. Les attaques de Fréron, journaliste influent et polémiste redoutable, contre les pièces de théâtre de Voltaire, provoquent de virulentes réactions depuis Ferney, où Voltaire organise la contre-offensive : articles, brochures, petits vers, comédies, pièces, tout est bon pour faire taire et ridiculiser les ennemis du parti philosophique. Voltaire et le parti philosophique utilisent aussi leurs relations politiques pour déstabiliser leurs adversaires, aboutissant à des suspensions du journal de Fréron, L'Année littéraire, et son incarcération à la Bastille.

En 1764, le Dictionnaire philosophique portatif, recueil de maximes et pensées, se répand, toujours clandestinement, en Europe. Considéré comme impie, il est condamné en France par le Parlement le (Louis XV, après avoir pris connaissance du livre aurait demandé : « Est-ce qu'on ne peut pas faire taire cet homme-là ? »), mais aussi à Genève et à Berne où il est brûlé. Manifeste des Lumières (Voltaire en donne quatre nouvelles éditions de 1764 à 1769 chaque fois enrichies d'articles nouveaux), le Dictionnaire est composé de textes brefs et vifs, rangés dans l'ordre alphabétique. « Ce livre n'exige pas une lecture suivie », écrit Voltaire en tête de volume, « mais, à quelque endroit qu'on l'ouvre, on trouve de quoi réfléchir ». De 1770 à 1774, l'ouvrage est complété et considérablement enrichi par les Questions sur l'Encyclopédie.

Dernières années (1768-1778)

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Le déiste toujours en lutte (1768-1769)

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« J'ai été pendant 14 ans l'aubergiste de l'Europe », écrit-il à Madame du Deffand. Ferney se trouve sur l'axe de communication de l'Europe du Nord vers l'Italie, itinéraire du Grand Tour de l'aristocratie européenne au XVIII siècle. Les visiteurs affluent pour le voir et l'entendre. Les plus nombreux sont les Anglais qui savent que le philosophe aime l'Angleterre (trois ou quatre cents selon Voltaire), mais il y a aussi des Français, des Allemands, des Italiens, des Russes. Leurs témoignages permettent de connaître la vie quotidienne à Ferney.

À Ferney, l'artiste genevois Jean Huber, devenu un familier de la maison, a fait d'innombrables croquis et aquarelles de Voltaire, à la fois comiques et familiers, dans l'ordinaire de sa vie quotidienne. En 1768, l'impératrice Catherine II lui commande un cycle de peintures voltairiennes dont neuf toiles sont conservées au musée de l'Ermitage.

Les capitaux que Voltaire investit tirent Ferney de la misère. Dès son arrivée, il améliore la production agricole, draine les marécages, plante des arbres, achète une nouveauté dont il est fier, la charrue à semoir et donne l'exemple en labourant lui-même chaque année un de ses champs. Il fait construire des maisons pour accueillir de nouveaux habitants, développe des activités économiques, soieries, horlogerie surtout. « Un repaire de 40 sauvages est devenu une petite ville opulente habitée par 1 200 personnes utiles », peut-il écrire en 1777.

À la fin des années 1990, l'État français achète le château de Ferney-Voltaire à présent administré par le Centre des monuments nationaux et ouvert au public après trois ans de travaux de restauration (2015-2018).

Dans l'expectative (1769-1773)

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En 1770, l'échec de la révolte des natifs genevois en amène plusieurs centaines à se réfugier sur les terres de Voltaire, leur protecteur. Celui-ci les prend sous son aile, leur construisant des maisons et, à 76 ans, se faisant entrepreneur. Il lance ainsi sur ses fonds une entreprise de soierie, de tuilerie et, surtout, d'horlogerie (une branche où la main d'?uvre genevoise des natifs trouvera à s'employer utilement). Entre 1770 et sa mort en 1778, Voltaire devient le banquier des émigrés genevois, il leur fournit les matières premières nécessaires à leurs entreprises, négocie les termes de leur présence en terre française, leur obtient des avantages fiscaux, exporte leurs produits à travers la Turquie, la Russie, le Maghreb, l'Amérique et les pays européens, ouvrant des filiales et vendant à son vaste réseau aristocratique.

Bien avant la mort de Louis XV, Voltaire souhaite revenir à Paris après une absence de près de 28 ans.

Le dernier combat (1773-1776)

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Depuis le début de , Voltaire souffre d'un cancer de la prostate (diagnostic rétrospectif établi de nos jours grâce au rapport de l'autopsie pratiquée le lendemain de son décès). La dysurie est majeure, les accès de fièvre fréquents ainsi que les pertes de connaissance. Les jambes gonflées font parler d'hydropisie (affection dont son probable père biologique serait mort en 1719). Le , il informe d'Alembert : « Je vois la mort au bout de mon nez ». Les mictions sont difficiles. L'été 1773, des forces reviennent, mais la crise de rétention aiguë d'urines de , le reprend en .

En , il perd sa plus jeune nièce de tuberculose, Marie-Élisabeth, marquise de Florian (ex M Dompierre de Fontaine, née Mignot). Suit, moins triste pour Voltaire, la mort de Louis XV de petite vérole le .

Le dernier acte (1776-1778)

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Médallion de Voltaire 1777, par Antonio Canova, Musée Correr Venise

Les nouvelles autorités font comprendre à ses amis qu'on fermerait les yeux s'il se rendait aux répétitions parisiennes de sa dernière tragédie. Après beaucoup d'hésitations, il décide de rallier la capitale en à l'occasion de la création d'Irène à la Comédie-Française. Il arrive le et s'installe dans un bel appartement de l'hôtel du marquis de Villette (qui a épousé en 1777 sa fille adoptive, Reine Philiberte de Varicourt surnommée « Belle et Bonne ») au coin de la rue de Beaune et du quai des Théatins (aujourd'hui quai Voltaire).

Dès le lendemain de son arrivée, Voltaire a la surprise de voir des dizaines de visiteurs envahir la demeure du marquis de Villette qui va devenir pendant tout son séjour le lieu de rendez-vous du Tout-Paris « philosophe ».

Le est le jour de son triomphe à l'Académie, à la Comédie-Française et dans les rues de Paris. Sur son parcours, une foule énorme l'entoure et l'applaudit. L'Académie en corps vient l'accueillir dans la première salle. Il assiste à la séance, assis à la place du directeur. À la sortie, la même foule immense l'attend et suit le carrosse. On monte sur la voiture, on veut le voir, le toucher. À la Comédie-Française, l'enthousiasme redouble. Le public est venu pour l'auteur, non pour la pièce. La représentation d'Irène est constamment interrompue par des cris. À la fin, on lui apporte une couronne de laurier dans sa loge et son buste est placé sur un piédestal au milieu de la scène. À la sortie, il est retenu longtemps à la porte par la foule qui réclame des flambeaux pour mieux le voir. On s'exclame : « Vive le défenseur des Calas ! ».

Voltaire peut mesurer ce soir-là l'indéniable portée de son action, même si la cour, le clergé et l'opinion antiphilosophique lui restent hostiles et se déchaînent contre lui et ses amis du parti philosophique, ennemis de la religion catholique.

La maladie (mars-mai 1778)

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« Je meurs en adorant Dieu, en aimant mes amis, en ne haïssant pas mes ennemis, et en détestant la superstition ».

Voltaire a 83 ans. Atteint d'un mal qui progresse insidieusement pour entrer dans sa phase finale le , Voltaire se comporte comme s'il était indestructible. Son état de santé et son humeur changent pourtant d'un jour à l'autre. Il envisage son retour à Ferney pour Pâques, mais il se sent si bien à Paris qu'il pense sérieusement à s'y fixer. Madame Denis, ravie, part à la recherche d'une maison. Il veut se prémunir contre un refus de sépulture. Dès le , il fait venir un obscur prêtre de la paroisse de Saint-Sulpice, l'abbé Gaultier, à qui il remet une confession de foi minimale (qui sera rendue publique dès le ) en échange de son absolution.

Le , il écrit à son secrétaire Wagnière les deux lignes célèbres : « Je meurs en adorant Dieu, en aimant mes amis, en ne haïssant pas mes ennemis, et en détestant la superstition ».

À partir du , malgré l'assistance du docteur Théodore Tronchin, ses souffrances deviennent intolérables. Pour calmer ses douleurs, il prend de fortes doses d'opium qui le font sombrer dans une somnolence entrecoupée de phases de délire. Mais une fois passée l'action de l'opium, le mal se réveille pire que jamais.

La conversion de Voltaire, au sommet de sa gloire, aurait constitué une grande victoire de l'Église sur la « secte philosophique ». Le curé de Saint-Sulpice et l'archevêque de Paris, désavouant l'abbé Gaultier, font savoir que le mourant doit signer une rétractation franche s'il veut obtenir une inhumation en terre chrétienne. Mais Voltaire refuse de se renier. Des tractations commencent entre la famille et les autorités soucieuses d'éviter un scandale. Un arrangement est trouvé. Dès la mort de Voltaire on le transportera « comme malade » à Ferney. S'il décède pendant le voyage, son corps sera conduit à destination.

Plaque commémorative, sise au 27, quai Voltaire.

Voltaire meurt le dans l'hôtel de son ami le marquis de Villette, « dans de grandes douleurs, excepté les quatre derniers jours, où il a fini comme une chandelle », écrit M Denis. Le , selon sa volonté, M. Try, chirurgien, assisté d'un M. Burard, procède à l'autopsie. Le corps est ensuite embaumé par M. Mitouart, l'apothicaire voisin qui obtient de garder le cerveau, le c?ur revenant à Villette.

Tombe de Voltaire, Panthéon.

Le neveu de Voltaire, l'abbé Mignot, ne veut pas courir le risque d'un transport à Ferney. Il a l'idée de l'enterrer provisoirement dans la petite abbaye de Sellières près de Romilly-sur-Seine, dont il est abbé commendataire. Le , le corps de Voltaire embaumé est installé assis, tout habillé et bien ficelé, avec un serviteur, dans un carrosse qui arrive à Sellières le lendemain après-midi. Grâce au billet de confession signé de l'abbé Gaultier, il est inhumé religieusement dans un caveau de l'église avant que Claude-Mathias-Joseph de Barral, évêque du diocèse du lieu, celui de Troyes, averti par l'archevêque de Paris Christophe de Beaumont, n'ait eu le temps d'ordonner au prieur de Sellières de surseoir à l'enterrement.

Le Panthéon

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Après la mort de Voltaire, M Denis, légataire universelle, vend Ferney à Villette (la bibliothèque, acquise par Catherine II, est convoyée jusqu'à Saint-Pétersbourg par Wagnière). Villette, s'apercevant que le domaine est lourdement déficitaire, le revend en 1785. Le transfert de la sépulture à Ferney devient impossible. L'abbé Mignot veut commander un mausolée pour orner la dalle anonyme sous laquelle repose Voltaire, mais les autorités s'y opposent.

En 1789, l'Assemblée constituante vote la nationalisation des biens du clergé. L'abbaye de Sellières va être mise en vente. Il faut trouver une solution. Villette fait campagne pour le transfert à Paris des restes du grand homme (il a déjà débaptisé de sa propre autorité le quai des Théatins en y apposant une plaque : « Quai Voltaire »). C'est lui qui lance le nom de Panthéon et désigne le lieu, la basilique de Sainte-Geneviève.

Transfert de Voltaire au Panthéon le (musée de la Révolution française).

Le , jour anniversaire de sa mort, l'Assemblée, malgré de fortes oppositions (les membres du clergé constituent le quart des députés) décide le transfert. Le , après la mort de Mirabeau survenue le 2, l'Assemblée décrète que « le nouvel édifice de Sainte-Geneviève sera destiné à recevoir les cendres des grands hommes ». Mirabeau est le premier « panthéonisé ». Voltaire le suit le . Comme le corps de Mirabeau fut retiré de ce monument des suites de la découverte de l'armoire de fer, Voltaire est devenu le plus ancien hôte du Panthéon.

Le cortège comprend des formations militaires, puis des délégations d'enfants. Derrière une statue de Voltaire d'après Houdon, portée par des élèves des beaux-arts costumés à l'antique, viennent les académiciens et gens de lettres, accompagnés des 70 volumes de l'édition de Kehl, offerts par Beaumarchais et illustrés par Jean Dambrun. Sur le sarcophage se lit une inscription : « Il vengea Calas, La Barre, Sirven et Monbailli. Poète, philosophe, historien, il a fait prendre un grand essor à l'esprit humain, et nous a préparés à être libres ».

  1. ? Mémoires de la comtesse de Boigne, Mercure de France, coll. « Le Temps Retrouvé », , p. 239.
  2. ? René Pomeau, Voltaire en son temps, t. I, p. 23.
  3. ? Jean Orieux, Voltaire, Paris, Flammarion.
  4. ? Jean-Michel Raynaud, Voltaire, soi-disant : Arouet, Paris, .
  5. ? Lorsque les Jésuites furent bannis de France, en 1764, Voltaire recueillit chez lui, à Ferney, un autre ancien professeur dont il fit son aumônier, le père Antoine Adam (1705-1787)
  6. ? Pierre Lepape, Voltaire le conquérant, Seuil, , p. 27.
  7. ? Louis (1832-1903) Auteur du texte Audiat, Saint Eutrope, premier évêque de Saintes, dans l'histoire, la légende, l'archéologie (3e édition) / par M. Louis Audiat, (lire en ligne sur Gallica)
  8. ? François (1774-1852) Auteur du texte Fayolle, Lettre à M. Millin, au sujet d'une ode de Voltaire sur le V?u de Louis XIII / [signé : F. Fayolle], (lire en ligne sur Gallica)
  9. ? Texte en ligne sur Wikisource
  10. ? Revue rétrospective, t. II, (BNF 32861344, lire en ligne sur Gallica), « Détentions de Voltaire ».
  11. ? Le rapport de Beauregard au lieutenant de police, qui a été conservé, est détaillé dans le tome 1 de Voltaire en son temps par Réné Pomeau (p. 95-96). On y lit la réponse d'Arouet quand Beauregard lui demande pourquoi il s'acharne contre le Régent : « Comment ! vous ne savez pas ce que ce bougre-là m'a fait ? Il m'a exilé parce que j'avais fait voir au public que sa Messaline de fille était une p? » Se répandant en propos injurieux contre la fille du Régent, Arouet ajoute que la Duchesse de Berry, derechef enceinte, s'est retirée au Château de la Muette (Paris) pour y accoucher en secret.
  12. ? « Il tomba malade à Volterra, ville de Toscane, où il fut accueilli avec tant de distinction, qu'il en garda le nom par reconnaissance, et les habitants de Volterra se félicitent encore aujourd'hui de cet honneur. Cette anecdote est absolument fausse. Voltaire ne voyagea jamais en Italie. Il tira son nom d'un petit domaine qui appartenait à sa mère; "J'ai été si malheureux avec l'autre (écrivait-il alors), que je veux voir si celui-ci m'apportera bonheur". » Louis-Mailleul Chaudon, Mémoires pour servir à l'histoire de M. de Voltaire, Amsterdam, 1785, p. 30.
  13. ? Louis-Mailleul Chaudon, Mémoires pour servir à l'histoire de M. de Voltaire., Amsterdam, (lire en ligne), page 30
  14. ? Voltaire en son temps, t. 1, p. 124.
  15. ? ?dipe, acte IV, scène 1.
  16. ? Citation d'Évelyne Lever, Le Temps des illusions : Chroniques de la Cour et de la Ville, 1715-1756, Paris, Arthème Fayard, .
  17. ? Proposée par un inventif et imprudent Contrôleur général (ministre des Finances) Le Pelletier-Desforts, cette loterie mensuelle dura près d'un an, avant le renvoi du Contrôleur et coûta cher à l'État. Le mécanisme de l'opération est résumé par René Pomeau dans Voltaire en son temps, tome 2, p. 259-260.
  18. ? René Pomeau, Voltaire en son temps, t. 1, p. 261.
  19. ? René Pomeau, Voltaire en son temps, t. 2, p. 10 et suivantes.
  20. ? Robert Dubois-Corneau, Jean Pâris de Montmartel, banquier de la cour, (lire en ligne sur Gallica), Selon l'opinion la plus partagée, Voltaire dut sa fortune aux Pâris. (?) Longchamp et Wagnieres, ses secrétaires, prétendent qu'à la fin de la première guerre d'Italie en 1734, il aurait touché chez Joseph Pâris six cent mille livres.
  21. ? Cet épisode marque profondément Voltaire, qui lui consacrera plusieurs textes : Sur la mort de Mlle Lecouvreur (1732), Sur la police des spectacles (1745), et Conversation de M. l'intendant des Menus avec M. l'abbé Grizel (1761).
  22. ? Extrait d'un portrait (anonyme et malveillant) de Voltaire, homme et auteur. de quatre pages qui a circulé vers 1734-1735 (donné par René Pomeau dans Voltaire en son temps, tome 1, p. 336 ? orthographe et ponctuation modernisées).
  23. ? Voltaire, « Lettre du 3 août 1735 à Cideville », dans ?uvres Complètes, t. 33, Garnier, (lire en ligne)
  24. ? René Pomeau, « Chap. 19 : « Le manifeste des Lumières » », dans Voltaire en son temps, t. 1.
  25. ? René Pomeau, Voltaire en son temps, t. 1, p. 330.
  26. ? Brigitte Salino, « Quand Voltaire menait les répétitions dans les combles », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  27. ? Véronique Laroche-Signorile, « Il y a 240 ans, la mort de Voltaire, philosophe des Lumières », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  28. ? Marcelo Wesfreid, « Emilie du Châtelet, la lumière de Voltaire », sur lexpress.fr, (consulté le ).
  29. ? [vidéo][documentaire télévisé] « Voltaire ou la liberté de penser », Stéphane Bern (présentateur) sur France 2, [Extrait publié le site web du Château de Cirey].
  30. ? « On suppose dans ce pernicieux libelle », écrit Voltaire le 24 novembre 1736, « qu'Adam caressait sa femme dans le paradis terrestre ; or dans les anecdotes de sa vie trouvées par Saint-Cyprien, il est dit expressément que le bonhomme ne bandait point, et qu'il ne banda qu'après avoir été chassé et de là vient le mot bander de misère. ».
  31. ? Lettre de Frédéric à Voltaire du 9 février 1737.
  32. ? Voltaire envoie au pape Benoît XIV Mahomet et La Bataille de Fontenoy avec ses respects et ses v?ux. Son objectif est faire accepter sa tragédie par le pape et de recevoir ses remerciements. Ce dernier remercie pour Fontenoy sans citer Mahomet et termine en donnant sa bénédiction apostolique à son « cher fils ». Voltaire retranscrit la lettre du pape en y rajoutant un remerciement pour « la sua bellissima tragedia di Mahomet, laquale leggemo con sommo piacere » et la fait circuler dans Paris.
  33. ? Lettre du 14 octobre 1748 à Ferriol.
  34. ? Pierre Lepape, Voltaire le conquérant, Seuil, , p. 193.
  35. ? Voltaire, « Zadig », dans Romans et contes, Paris, Gallimard, coll. « La Pléiade », (ISBN 9782070109616), p. 71.
  36. ? Un petit buste de Voltaire y est aujourd'hui exposé.
  37. ? Toujours à l'affût des opérations avantageuses, Voltaire spécule avec deux hommes d'affaires juifs, les Hirschel, sur un emprunt d'état de la Saxe. L'affaire se complique. Voltaire porte plainte et fait arrêter l'un des Hirschel. Suit un procès que Voltaire va gagner malgré l'opinion qui lui est hostile. Frédéric est furieux que son chambellan se compromette ainsi.
  38. ? Mémoires pour servir à la vie de M. de Voltaire.
  39. ? Jésuite recueilli par Voltaire à Ferney après la suppression de la Compagnie. Il lui sert de chapelain et de partenaire aux échecs. La plaisanterie habituelle de Voltaire est de le présenter ainsi : « Voici le P. Adam, qui n'est pas le premier des hommes ».
  40. ? Il n'apprécie qu'assez peu la ville où, dans ces circonstances, il ne sent pas très bien : « Colmar, une ville mi-allemande, mi-française et tout à fait iroquoise ».
  41. ? La « tribu » Tronchin (selon le mot de Voltaire), grande famille de banquiers et de notables genevois, est nombreuse. Voltaire entretient des relations, souvent amicales, avec la plupart de ses membres. François (1704-1798) est l'un des vingt-cinq membres du Petit-Conseil chargé de l'exécutif de Genève. C'est pour Voltaire un ami constant et un médiateur efficace avec les autorités de la ville. Jean-Robert Tronchin (1702-1788), le frère de François, banquier à Lyon, administre les fonds de Voltaire. Théodore Tronchin, un cousin, est son médecin. Un autre cousin, Jean Robert Tronchin (1710-1793), procureur général à Genève, le soutient. Citons encore deux frères de François, Pierre, membre du Conseil des Deux Cents à Genève, et Louis, pasteur et professeur de théologie.
  42. ? Qui s'appelle encore Essai sur l'histoire générale.
  43. ? Des milliers de personnes ont péri le 1 novembre 1755 dans un raz-de-marée qui a détruit une partie de la ville.
  44. ? Voltaire, Lettres inédites à son imprimeur Gabriel Cramer, Droz-Giard, ? édition, introduction et notes par Bernard Gagnebin..
  45. ? Bernard Gagnebin, « La diffusion clandestine des ?uvres de Voltaire par les frères Cramer », dans Cinq siècles d'imprimerie à Genève : 1478-1978, Genève, Impr. Kundig, , p. 173-194. - ? Repris dans : Annales de l'Université de Lyon, 3 série, Lettres, Lyon, Fasc. 39, p. 119-132.
  46. ? Robert Darnton (L'Aventure de l'Encyclopédie, Cambridge, 1979, Paris, 1982) a montré que l'Encyclopédie a été vendue davantage à l'étranger qu'en France.
  47. ? Article « Autorité politique » rédigé par Diderot : « Aucun homme n'a reçu de la nature le droit de commander aux autres (?) Le gouvernement n'est pas un bien particulier mais un bien public, qui par conséquent ne peut jamais être enlevé au peuple, à qui seul il appartient essentiellement et en pleine propriété. » (tome I de l'Encyclopédie).
  48. ? « Histoire », « Français », « Gens de lettres », « Généreux », « Galant »? « Fornication » (Il « ne peut ni dire, ni faire beaucoup sur ce mot », plaisante-t-il dans une lettre à d'Alembert).
  49. ? Lettre à d'Alembert du 5 avril 1766.
  50. ? « On se plaint moins à Genève qu'ailleurs des progrès de l'incrédulité, ce qui ne doit par surprendre ; la religion y est presque réduite à l'adoration d'un seul Dieu, du moins chez tout ce qui n'est pas peuple : le respect pour Jésus-Christ et pour les Écritures sont peut-être la seule chose qui distingue d'un pur déisme le christianisme de Genève ».
  51. ? Lettre du 21 janvier 1761 à Tronchin.
  52. ? Zufferey Jonathan, Le village mobile : population et société à Ferney-Voltaire, 1700-1789, La Ligne d'ombre, 2011 (ISBN 978-2-95286-039-0).
  53. ? Lettre du 19 mars 1761 à D'Olivet.
  54. ? Lettre à Richelieu du 30 mars 1775.
  55. ? Lettre du 15 avril 1767 à Jacob Vernes.
  56. ? Lettre du à Helvétius.
  57. ? René Pomeau, Voltaire en son temps, t. 4, p. 9.
  58. ? L'épigramme contre Fréron est restée célèbre « L'autre jour au fond d'un vallon, / Un serpent piqua Jean Fréron ; / Que croyez-vous qu'il arriva ? / Ce fut le serpent qui creva. »
  59. ? Lettre du 30 mars 1768 à M du Deffand.
  60. ? CHERBULIEZ Joel, « Voltaire et les Natifs de Genève » in Bibliothèque universelle de Genève, Tome 23, 1853, p. 441-462.
  61. ? René Pomeau, Voltaire en son temps, tome 5, p. 319.
  62. ? Couronnement de Voltaire sur le théâtre français le 30 mars 1778, bnf
  63. ? D'Alembert témoigne dans une lettre à Frédéric II : « Quelques jours avant sa maladie, il m'avait demandé, dans une conversation de confiance, comment je lui conseillerais de se conduire, si pendant son séjour, il venait à tomber grièvement malade. Ma réponse fut celle que tout homme sage lui aurait faite à ma place, qu'il ferait bien de se conduire en cette circonstance comme tous les philosophes qui l'avaient précédé, entre autres Fontenelle et Montesquieu, qui avaient suivi l'usage et reçu ce que vous savez avec beaucoup de révérence. Il approuva beaucoup ma réponse : « Je pense de même, me dit-il, car il ne faut pas être jeté à la voirie, comme j'ai vu jeter la pauvre Lecouvreur. » Il avait, je ne sais pourquoi, beaucoup d'aversion pour cette manière d'être enterré. » (cité par René Pomeau, Voltaire en son temps, T.5, p. 281).
  64. ? Il ne dit pas qu'il est catholique, mais « qu'il meurt dans la religion catholique ». Il ne renie rien de ce qu'il a écrit, mais déclare que s'il a scandalisé l'Église, il en demande pardon. Il refuse la communion sous prétexte qu'il crache le sang. L'abbé Gaultier donne alors à Voltaire l'absolution.
  65. ? Le texte a été publié dans la revue Correspondance littéraire, philosophique et critique, avril 1778, p. 201-202: "Je soussigné, déclare qu'étant attaqué depuis quatre jours d'un vomissement de sang, à l'âge de quatre-vingt-quatre ans, et n'ayant pu me traîner à l'église, et M. le curé de Saint-Sulpice ayant bien voulu ajouter à ses bonnes ?uvres celle de m'envoyer M. l'abbé Gautier, prêtre, je me suis confessé à lui, et que si Dieu dispose de moi, je meurs dans la sainte religion catholique où je suis né, espérant de la miséricorde divine qu'elle daignera pardonner toutes mes fautes ; et que si j'avais jamais scandalisé l'église, j'en demande pardon à Dieu et à elle. A signé, Voltaire, le 2 mars 1778, dans la maison de M. le marquis de Villette. En présence de M. l'abbé Mignot, mon neveu, et de M. le marquis de Villevieille, mon ami. ? Signé, l'abbé Mignot, Villevieille."
  66. ? Voir M.J. Gaberel - Voltaire et les Genevois ainsi que Récit complet et détaillé de l'arrivée et du séjour de Voltaire à Paris en 1778, Edouard Damilaville, 1878.
  67. ? Voir dans le § Informations complémentaires l'histoire de ces deux organes.
  68. ? Condamné à mort ainsi que sa femme pour parricide sans aucune preuve, ni même aucun indice sérieux, Monbailli est exécuté en 1770. Voltaire est saisi de l'affaire. Il publie un exposé de la cause, fait appel au chancelier Maupeou et sauve M Monbailli. Son mari est réhabilité.


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