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Naissance | Chiaravalle (royaume d'Italie) |
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Décès |
(à 81 ans) Noordwijk (Royaume des Pays-Bas) |
Sépulture |
Noordwijk |
Nationalité |
italienne |
Formation |
université de Rome « La Sapienza » |
Activités |
Médecin, pédagogue, essayiste |
Enfant |
Mario Montessori |
A travaillé pour |
Université de Rome « La Sapienza » |
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Membre de |
Associazione per la donna (en) |
Distinctions |
Chevalier de la Légion d'honneur? () Officier de l'ordre d'Orange-Nassau |
Maria Montessori, née le à Chiaravalle près d'Ancône dans les Marches (Italie) et décédée le à Noordwijk aan Zee (Pays-Bas), est une médecin et pédagogue italienne.
Elle est connue pour la méthode pédagogique qui porte son nom, la pédagogie Montessori.
Maria Montessori est issue d'une famille bourgeoise. Elle fréquente l'école communale d'Ancône.
Originaire de la région d'Émilie-Romagne, son père, Alessandro Montessori, est né à Ferrare. Il appartient à une famille conservatrice de la région de Bologne. Il suit différentes formations au cours de sa carrière. D'abord militaire puis employé dans les salines de Comacchio, il endosse ensuite les fonctions d'inspecteur des finances de l'industrie du tabac et du sel. Dans son cadre professionnel, il est transféré à Chiaravalle. C'est dans cette commune qu'en 1865, il rencontre Renilde Stoppani (1840-1912), mère de Maria.
Originaire de Monte San Vito, un village situé dans les environs de Chiaravalle, sa mère est issue d'une famille aisée (petits propriétaires terriens) et catholique qui exerce alors le métier de comptable dans la fonction publique. Elle est sympathique avec les idéaux du Risorgimento. Elle est la nièce du prêtre Antonio Stoppani, philosophe et savant milanais. Passionnée de littérature et affichant une vision libérale de la société malgré son éducation stricte, Renilde Stoppani transmet cette modernité d'esprit à sa fille Maria, l'encourageant à être indépendante, à défendre ses idées et à assumer ses ambitions. Maria recevra de sa part un soutien constant pour ses idées novatrices et ses choix de vie inhabituels pour l'époque qui contrastent également avec un certain conversatisme de son père. En lui apprenant à tricoter pour les plus démunis, la mère de Maria lui transmettra ses valeurs de compassion.
En 1873, ses parents déménagent à Florence pour le travail d'Alessandro. Ils y vivent deux ans puis déménagent à Rome pour permettre à Maria de bénéficier d'une instruction que la ville d'Ancône ne peut lui offrir. Montessori entre dans une école primaire publique à l'âge de 6 ans en 1876. Elle reçoit des certificats pour bonne conduite en première année et pour « lavori donneschi », ou « travail de femme », l'année suivante. Les parents de Maria souhaitent qu'elle devienne enseignante, un des métiers accessibles aux femmes de la bourgeoisie à l'époque. Jusqu'à l'âge de onze ans, Maria est freinée dans ses études par des problèmes de santé (rubéole). Mais, elle se révèle très vite brillante, même si ses premiers résultats scolaires ne sont « pas particulièrement remarquables ». Vers l'âge de onze ans, elle commence à reprendre des études. Sa passion de jeunesse est le théâtre. Elle excelle en italien, mais a des lacunes en grammaire et en mathématiques.
Dès l'âge de quatorze ans, Maria se passionne pour les mathématiques. Encouragée par sa mère, elle s'obstine et intègre, en 1884, le collège technique Michelangelo Buonarroti réservé aux garçons, malgré l'opposition de son père. Elle en sort diplômée deux ans plus tard. Elle y découvre la biologie.
En février 1884, elle poursuit ensuite son cursus secondaire au lycée technique Leonardo da Vinci. La création de cette école faisait partie du plan de politique scolaire de l'Italie post-unification. Maria a fait partie des dix premiers élèves et a obtenu 137/160. En 1890, elle obtient son baccalauréat puis s'inscrit à l'université, en sciences naturelles. Elle trouve très vite sa vocation et souhaite devenir médecin malgré les préjugés et le refus du ministre de l'Éducation nationale de l'époque, Guido Bacelli, à qui elle déclare : « Je sais que je serai médecin. »
Dès ses premières années d'études, la jeune fille manifeste un intérêt pour les matières scientifiques, en particulier les mathématiques et la biologie, ce qui la met en conflit avec son père, qui aurait souhaité qu'elle entame une carrière d'enseignante ; sa mère, en revanche, ne cessera jamais de la soutenir. Maria Montessori ne peut tout d'abord pas s'inscrire à la faculté de médecine, comme elle en avait la ferme intention, parce qu'elle n'a pas de diplôme d'études secondaires classiques.
En 1892, malgré ces nombreux obstacles, Maria Montessori réussit à intégrer la faculté de médecine de Rome La Sapienza et à décrocher une bourse. Elle donne également des leçons particulières pour avoir un revenu et assumer les frais de sa scolarité. C'est une élève qui excelle. La discorde avec son père s'amplifie. De nombreuses personnes de son entourage la critiquent et se montrent hostiles à son égard. Elle est cependant soutenue par le ministre Baccelli et aussi par le pape Léon XIII, qui déclare : « De toutes les professions, la plus convenable pour une femme est celle de médecin ».
En entrant à la faculté, Maria Montessori doit suivre des règles strictes pour faire partie d'une communauté scientifique composée majoritairement d'hommes car, dans le domaine de la médecine, il existe encore de nombreux préjugés à l'encontre du sexe féminin. De plus, Montessori est obligée de pratiquer l'anatomie principalement la nuit, afin de ne pas créer de scandale car, à l'époque, il n'est pas raisonnable qu'une femme soit aux prises avec le corps nu d'un homme décédé et travaille avec d'autres étudiants masculins.
Les leçons d'hygiène expérimentale d'Angelo Celli, originaire comme elle de la région des Marches, sont particulièrement importantes pour l'engagement futur de Montessori auprès des enfants des bidonvilles de Rome. Il est fermement convaincu que certaines maladies répandues, comme la malaria et la tuberculose, ne sont pas dues à une incapacité de la science médicale, mais qu'elles sont l'expression de la marginalité sociale et ne peuvent donc être éradiquées qu'avec l'engagement de l'État.
En 1896, à 26 ans, Maria Montessori obtient son diplôme de docteur en médecine avec une thèse dans le domaine de la psychiatrie sur l'hallucination antagoniste, pour laquelle elle bénéficie du soutien d'Ezio Sciamanna, directeur de la clinique psychiatrique de l'université de Rome. Elle décroche la note de 105/110. Elle est la troisième femme diplômée de médecine en Italie. Elle obtient également une licence en biologie, philosophie et psychologie. Plus tard, elle se spécialisera en neuropsychiatrie. Maria Montessori se consacre à la recherche en laboratoire avec passion et méthode et l'observation dans les salles d'asile de l'hôpital Santa Maria della Pietà de Monte Mario (Rome). Pendant la préparation de sa thèse, elle assiste aux cours d'anthropologie physique (ou biologique) de Giuseppe Sergi. La thèse qu'elle présente le 10 juillet 1896, est de nature expérimentale : près de cent pages manuscrites portant le titre « Contribution clinique à l'étude des hallucinations à contenu antagoniste » (pp. 33-37).
Outre des cours de bactériologie et de microscopie, elle suit un cours d'ingénierie expérimentale. Elle étudie également la pédiatrie à l'hôpital pour enfants Bambino Gesù, la gynécologie à l'hôpital San Giovanni et les maladies de l'homme à l'hôpital Santo Spirito ; ces établissements de santé sont tous situés à Rome et sont encore en activité aujourd'hui.
Maria Montessori était une étudiante très douée, à tel point qu'elle a obtenu un prix de mille lires (environ quatre mille euros en 2020) de la Fondation Rolli pour ses travaux en pathologie générale. En 1895, elle obtient un poste d'« adjointe en médecine » dans les hôpitaux avec le droit d'entrer dans la Société Lancisienne, réservée aux médecins et professeurs des hôpitaux de Rome. Son cursus est excellent en matière d'hygiène, de psychiatrie et de pédiatrie, matières qui constitueront la base de son avenir.
Entre 1894 et 1896, elle travaille comme assistante dans cette clinique, où elle rencontre plusieurs enfants déficients mentalement. Elle obtient un poste d'assistante à la clinique psychiatrique de l'université de Rome, en collaboration avec Giuseppe Ferruccio Montesano (avec qui elle entretient une relation professionnelle et affective), et se consacre à la réhabilitation des garçons et des filles atteints de troubles mentaux, définis à l'époque comme anormaux. Elle constate avec effarement qu'ils sont mélangés aux adultes et qu'ils n'exercent aucune activité, n'ayant aucun jeu à leur disposition alors que la manipulation lui semble être un élément essentiel au bon développement cognitif. Elle obtient du directeur de l'hôpital la création d'un service séparé qui sera considéré comme l'un des premiers services pédo-psychiatriques d'Italie. Son travail à la clinique l'a mise en contact matériel avec les milieux scientifiques du Royaume-Uni et de la France. C'est ainsi qu'elle s'est intéressée à la littérature scientifique française du début du XIX siècle sur les cas de garçons sauvages élevés par des animaux et découverts dans des régions isolées au cours du XVIII siècle.
Parallèlement, elle découvre les recherches de Jean Itard (1774-1838), médecin français, inventeur de l'otorhinolaryngologie, qui travaille auprès de sourds-muets et notamment ses écrits sur Victor, l'enfant sauvage de l'Aveyron, ainsi que ceux d'Édouard Séguin (1812-1880), pédagogue français auprès d'enfants « idiots », à Bicêtre, auteur de Hygiène et éducation des idiots publié en 1846, qui quitte la France en 1850 et devient médecin aux États-Unis. Ces deux personnalités qui ont influencé Montessori pensent qu'il est possible d'intégrer les garçons et les filles dits anormaux dans la communauté par une éducation appropriée. C'est précisément sa participation à de nombreux congrès pédagogiques dans diverses villes européennes qui lui permet d'entrer en contact avec l'école d'Itard et de Séguin et de connaître leurs méthodes expérimentales de rééducation des personnes manifestant des besoins spéciaux.
Très vite, elle milite activement pour la défense et la reconnaissance des droits des femmes ainsi que ceux des enfants atteints de déficience mentale.
Elle participe à de nombreux autres congrès, comme le congrès international des femmes à Berlin en 1896 en tant que représentante de l'Italie. L'un des discours qu'elle y prononça sur le droit à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes est resté célèbre. À cette occasion, les ouvrières de sa ville natale, Chiaravalle, ont collecté une somme pour contribuer aux frais de voyage. Elle participe également au congrès des femmes qui se tient ensuite à Londres en 1899. En 1906, elle écrit dans le journal La Vita un appel invitant les femmes italiennes à s'inscrire sur les listes électorales politiques, aucune loi n'interdisant expressément le suffrage féminin. Elle s'inspire pour cela de son histoire personnelle : aucune loi en Italie n'interdisait de s'inscrire à l'université de médecine et seules les conventions sociales le rendaient impossible ; Montessori est néanmoins devenue médecin. L'appel à l'inscription est relayé par de nombreuses femmes, notamment des institutrices, des infirmières et des sages-femmes, qui s'adressent aux cours d'appel de leur ville. Toutes les décisions sont défavorables, à l'exception de la ville d'Ancône, où dix institutrices obtiennent la carte électorale, créant ainsi un précédent important et anticipant de quarante ans la conquête du droit de vote des femmes. Maria Montessori écrit alors, en s'adressant à la ville : « ... En toi est née la femme, en toi est née la rédemption de la femme ». En , de passage à Washington, elle est parmi les fondatrices de l'Union du congrès pour le droit de vote des femmes, avec Alice Paul et Lucy Burns.
En 1898, elle intervient au Congrès pédagogique de Turin pour présenter ses travaux sur les enfants dits « débiles » et défendre leurs droits. Elle y présente les résultats de ses premières recherches et, peu de temps après, devient directrice de l'école d'enseignement orthophrénique de Rome. Alors que ses intérêts se déplacent du côté de l'éducation, elle décide de renouveler ses bases culturelles en obtenant un diplôme de philosophie. Ses succès scientifiques, obtenus dans une atmosphère culturelle fortement influencée par le positivisme, lui valent des prix et des bourses, et l'amènent à participer à des recherches sur les enfants retardés, avec son collègue Giuseppe Montesano, avec qui elle entame une relation amoureuse, gardée secrète par sa volonté. De cette relation naît en 1898 un fils, Mario, que Maria, sous la pression de la famille Montesano, accouche en secret et confie à une famille de Vicovaro (petit village du Latium), sous la garde de Vittoria Pasquali, qui lui rend toutefois visite chaque semaine et le fait ensuite inscrire dans un pensionnat. Après la mort de sa mère adoptive, Maria emmène son fils, âgé de 14 ans, avec elle, en disant qu'il est son neveu (la vérité n'a été révélée que dans son testament). Par la suite, la relation avec Montesano se termine de façon dramatique ; à partir du moment où Maria Montessori apprend que Montesano va épouser une autre femme, elle commence à ne porter que du noir, en deuil éternel de cet amour qui s'est éteint. Le renoncement à son fils et la fin de sa relation amoureuse marquent sans aucun doute des changements fondamentaux dans la vie de Maria Montessori. C'est à ce moment-là qu'elle commence à retenir l'attention des autorités italiennes. Guido Baccelli, alors ministre de l'Éducation, lui demande de faire des conférences à Rome. Il lui confie ensuite le poste de directrice de l'école orthophrénique (Scuola Magistrale Ortofrenicade) de Rome de 1899 à 1901.
Pour exercer sa profession au mieux, elle part en France étudier la pédagogie. Elle s'appuie sur les méthodes éducatives pour enfants déficients de Jean Itard et Édouard Séguin, précurseurs d'une nouvelle approche de la maladie mentale, pour créer son propre matériel. Elle ramène de Paris leurs travaux qu'elle traduit et recopie à la main la nuit alors qu'elle travaille le jour avec des enfants déficients auxquels elle apprend à lire, à écrire. Son matériel est un véritable succès car les enfants réussissent davantage les examens de lecture et d'écriture.
De ses recherches, Maria Montessori conclut que l'éducation est plus bénéfique à ces enfants que les seuls soins médicaux. Elle déclare : « J'eu l'intuition que le problème de ces déficients était moins d'ordre médical que pédagogique? ».
En rentrant à Rome, elle retrouve ses activités de médecin-assistant en chirurgie, à l'hôpital de Santo Spirito in Sassia.
Peu de temps après, elle crée sa propre école d'orthophrénie, y forme des enseignants et leur fait prendre conscience de l'importance de l'observation : « Observer et non juger. »
En 1901, elle commence à s'intéresser aux enfants valides. Elle entreprend des études de psychologie et de philosophie.
En 1903, elle est nommée médecin adjoint de deuxième classe dans les rôles de l'état-major de la Croix-Rouge italienne, avec un grade militaire similaire à celui de sous-lieutenant, disponible pour les services des hôpitaux territoriaux de la CRI.
En 1904, elle obtient une chaire d'anthropologie et devient professeur à l'université de Rome. Elle a ainsi l'occasion de travailler sur l'organisation pédagogique des jardins d'enfants. Durant cette année, elle publie aussi son premier ouvrage, intitulé Anthropologie pédagogique.
À partir de 1906, elle crée sa méthode pédagogique pour les très jeunes enfants valides et, en 1907, elle ouvre la première Maison des enfants (Casa dei bambini) dans le quartier populaire de San Lorenzo à Rome avec la contributions des barons Alice et Leopoldo Franchetti. Le couple rencontre la pédagogue des Marches chez l'écrivain Sibilla Aleramo. Il décide de lui apporter un soutien concret en l'invitant à séjourner à Villa Montesca durant l'été 1909. Sous l'impulsion des Franchetti, Montessori rédige ce qui deviendra plus tard la première édition de sa célèbre Méthode, qu'elle dédie au couple. À la même époque, elle organise le premier cours de formation des enseignants à la méthode Montessori au Palazzo Alberti-Tomassini, siège de l'atelier Tela Umbra à Città di Castello. À la suite de ce cours, la baronne Franchetti inaugure une « Maison des enfants » à la Villa Montesca.
C'est par l'intermédiaire d'Alice Hallgarten Franchetti, Romeyne Robert Ranieri di Sorbello a pu rencontrer Montessori et la gouvernante Felicitas Buchner à la Villa Wolkonsky à Rome en 1909. La méthode Montessori a d'abord été adoptée à la demande de la marquise Romeyne directement sur ses trois fils Gian Antonio, Uguccione et Lodovico Ranieri di Sorbello, et en particulier les deux premiers ont littéralement servi de cobayes pour tester le matériel Montessori expérimenté à la Villa Montesca pendant l'été 1909. La méthode est ensuite appliquée entre l'été et l'automne 1909 à l'enseignement dans les écoles primaires rurales de Pischiello en Ombrie, fondées par la marquise Ranieri di Sorbello elle-même. Le choix de la méthode Montessori par la marquise Romeyne est dicté par la nécessité de compenser les graves conditions de retard culturel des enfants locaux, prédisposés à un âge avancé, entre 6 et 9 ans, à l'alphabétisation abordée dans la première classe.
Pour améliorer la vie du quartier où est citée la première Maison des enfants, un organisme met en chantier la construction de deux immeubles pour accueillir une population défavorisée. Son directeur demande alors à Montessori d'organiser la vie des enfants de ces immeubles pour les empêcher d'errer, de semer le désordre et instaurer une harmonie familiale.
Les parents ont libre accès à l'école. En contrepartie, ils doivent veiller à la propreté et à la bonne tenue des enfants. L'institutrice habite dans l'immeuble pour mieux collaborer avec les parents dans l'éducation des enfants. La Casa dei bambini devient une base de recherche et un laboratoire d'expérimentation où Maria Montessori construit et éprouve sa méthode. Grâce à cette dernière, elle devient mondialement connue. Sa méthode s'appuie essentiellement sur la liberté des élèves, ce qui a révélé des changements de comportement inattendus chez eux. Les enfants les plus timides peuvent s'exprimer davantage.
La pédagogie Montessori repose sur les principes suivants : le libre choix de l'activité, l'autodiscipline, le respect du rythme de chacun et l'apprentissage par l'expérience. « Tout enfant est un roi en marche vers l'aurore » affirme Maria Montessori. L'objectif est de donner une éducation aux enfants pour qu'ils deviennent des adultes responsables, indépendants et capable de s'adapter.
« N'élevons pas nos enfants pour le monde d'aujourd'hui, écrivait le docteur. Ce monde n'existera plus lorsqu'ils seront grands. Et rien ne nous permet de savoir quel monde sera le leur : alors, apprenons-leur à s'adapter. »
? Maria Montessori
En 1909, elle forme ses premiers enseignants afin de leur montrer l'importance de l'observation plutôt que du jugement.
Maria Montessori s'exile une première fois en Espagne, invitée par le gouvernement afin d'élaborer des cours de formation à sa pédagogie. Elle profite de cette occasion pour rédiger des livres en espagnol.
En 1912, Alexander Graham Bell et sa fille l'invitent sur le sol américain et ouvrent la première maison d'enfants aux États-Unis. Par la suite, des écoles ont continué à être ouvertes et l'American Montessori Association a été créée, dirigée par Bell lui-même et Margaret Wilson, fille du président Woodrow Wilson.
À partir de 1913, de nombreuses organisations caritatives lui demandent de créer des maisons d'enfants. Elle multiplie les voyages pour donner des conférences sur ses méthodes d'enseignement et organiser des stages de formation pédagogique. Elle est désormais une pédagogue de renommée internationale.
Fin 1913, elle part aux États-Unis sans son fils, resté à Rome sous la responsabilité de sa fidèle amie Anna Maccheroni, ce qui lui crève le c?ur. Elle est accompagnée de son imprésario, Samuel S. McClure, qui se charge de la promotion de sa « Méthode », dont la traduction est un best-seller. Elle y crée un collège pour enseignants et dirige une « semaine pédagogique ». Elle reste aux États-Unis jusqu'en 1918. Lors de son arrivée aux États-Unis, le New York Tribune présente Maria Montessori comme « la femme la plus intéressante d'Europe ». Dès lors, sa méthode a connu un grand intérêt en Amérique du Nord, qui s'est ensuite estompé avec le temps, jusqu'à son retour soutenu par Nancy McCormick Rambusch, fondatrice de l'American Montessori Society en 1960. Le succès de l'expérience romaine a donné naissance au « mouvement Montessori », qui a donné naissance en 1924 à la « Scuola magistrale Montessori » et à l'« Opera Nazionale Montessori », cette dernière étant érigée en organisation à but non lucratif et visant à la connaissance, à la diffusion, à la mise en ?uvre et à la protection de la méthode Montessori. Maria Montessori en devient la présidente d'honneur.
De 1921 à 1931, elle participe aux échanges de la Ligue internationale pour l'éducation nouvelle et rencontre d'autres grands pédagogues de ce mouvement, tels que Adolphe Ferrière, John Dewey et Roger Cousinet. En 1927, elle s'adresse à Sigmund Freud qui lui répond : « Recevoir une lettre de vous m'a causé une joie immense. M'étant occupé de tout temps du psychisme de l'enfant, vos efforts si humains et si compréhensifs m'inspirent une grande sympathie ; ma fille, qui est une pédagogue analyste, se range au nombre de vos disciples ».
Sa position politique a été diversement et instrumentalement interprétée : certains critiques de gauche l'ont jugée de droite en raison des nombreuses écoles publiques ouvertes en son nom et de ses amitiés haut placées. D'autre part, le foyer idéaliste n'a pas apprécié l'importance qu'elle accordait à la recherche scientifique, pas plus que la droite n'a apprécié ses suggestions concrètes visant à garantir l'égalité et à éviter les classes basées sur des jugements élitistes. Dans un premier temps, Maria accepte le soutien de Mussolini, qui souhaite résoudre le problème de l'analphabétisme grâce aux « Maisons d'enfants ».
En 1914, Maria Montessori s'installe en Espagne, où elle reste jusqu'à la fin de la guerre mondiale. Elle retourne en Italie en 1924 et, après avoir adhéré au parti fasciste, gagne les applaudissements du Duce : « Le télégraphe Marconi et la méthode Montessori expriment deux forces, deux génies unis dans l'auguste nom de la Patrie pour réaliser le dessein que la Providence de Dieu a certainement tracé ».
En 1924 également, un cours fut organisé à Milan avec les éloges du régime et la Société des Amis de la Méthode se transforma en une organisation à but non lucratif, prenant le nom d'Opera Nazionale Montessori, avec des bureaux à Naples et à Rome, avec Benito Mussolini lui-même comme président d'honneur. Cependant, les petites écoles, dont il ne voulait pas directement, lui donnaient à la fois du lustre et de la gêne, peut-être parce qu'il n'exerçait pas un contrôle total sur le projet (même Maria Josè de Savoie, qui n'avait guère de sympathie pour le fascisme, y participait). C'est l'époque où l'idéalisme de Croce et de Gentile domine sur le plan culturel : éloignés sur certains aspects, ils prônent tous deux une attaque frontale contre l'éducation scientifique et donc contre l'approche qui caractérise également la méthode Montessori. La même année, le directeur général de l'éducation, Giuseppe Lombardo Radice, qui s'était montré favorable à la méthode Montessori au cours des années précédentes, adresse de vives critiques à Maria : il l'accuse d'avoir volé des idées à Rosa et Carolina Agazzi, affirmant que seules les deux s?urs de Brescia ont mis au point une méthode véritablement « italienne ». Dans le sillage de Lombardo Radice, d'autres critiques ont été formulées. Montessori est qualifiée de « charmeuse habile », de « déguiseuse », de « femme d'affaires ». Maria laisse encore une fois tomber la critique, comme si elle ne la concernait pas, mais à partir de ce moment-là, les relations avec le fascisme commencent à se dégrader.
Malgré cela, le dirigeant fasciste italien Benito Mussolini porte un fort intérêt aux écoles Montessori : le gouvernement fasciste souhaite s'appuyer sur la réforme de l'instruction comme socle du nouveau régime fasciste. De plus, à la suite d'une entrevue en 1924, il prend la décision de confier à Maria Montessori des écoles d'État ainsi que la formation des enseignants. Malgré les accusations d'anti-italianisme, Mussolini lui-même soutient Montessori, estimant que la renommée internationale qu'elle a acquise est une fierté pour l'Italie ; le chef du fascisme est même président d'honneur du cours et donne une subvention de 10 000 lires de son fonds personnel à l'?uvre.
En 1926, Montessori a pu organiser le premier cours de formation national qui préparait les enseignants à suivre sa méthode. Le cours a lieu à Milan et 180 enseignants y participent. Ils venaient principalement des régions les plus proches du lieu du cours (Lombardie et Vénétie) et des Marches, la patrie de Montessori ; d'autres participants venaient de Rome. Le cours dure six mois et est financé par le gouvernement fasciste.
En 1929, grâce notamment aux efforts de Mario Montessori, est fondée l'Association internationale Montessori (AMI), dont le siège est à Rome et qui bénéficie du soutien convaincu, entre autres, de Sigmund Freud, Jean Piaget et Rabindranath Tagore.
Des cours internationaux de formation à la méthode Montessori sont organisés à Rome en 1930 et 1931. Après les cours internationaux et les conférences à l'étranger, notamment celle de Genève sur la paix qui eut un retentissement international, la rupture avec le régime fut définitive. En 1933, La pace e l'educazione est publié, mais Maria Montessori est alors marginalisée par la culture fasciste. En effet, celle-ci se considère cependant « apolitique » et seulement militante de « la cause des enfants », professant par ailleurs des idées pacifistes. Mais l'emprise du régime fasciste sur les 70 établissements Montessori se fait de plus en plus forte (uniforme, salut fasciste, carte du parti, etc.), dévoyant son enseignement.
En Allemagne, à partir de 1934, à la suite de mise en place du régime nazi et de sa prise de contrôle progressive de l'éducation, des jalons sont posés successivement dans le cadre de la fermeture des écoles Montessori, ainsi que d'autres institutions éducatives basées sur des pédagogies alternatives. L'une de ses étapes est la loi sur la jeunesse hitlérienne. Cette loi visait à unifier tous les mouvements de jeunesse sous l'autorité directe nazie. Elle a permis de centraliser et de contrôler la formation idéologique des jeunes, les préparant à servir le régime nazi. Les écoles alternatives comme les écoles Montessori (ou encore Waldorf) qui prônaient des valeurs incompatibles avec l'idéologie nationale-socialiste, ont été attaquées. Le contrôle total sur la jeunesse faisait partie d'une stratégie plus large de mise au pas (Gleichschaltung) de la société allemande et il se devait d'écarter toute incomptabilité. C'est ainsi que le régime nazi sous Hitler ordonna la fermeture de toutes les écoles Montessori, tant pour les adultes que pour les enfants, à l'exception de deux ou trois classes qui vivaient dans une semi-clandestinité.
En Italie, en 1936, le régime ferme également, sur ordre du ministre Cesare Maria De Vecchi, l'école royale triennale de la méthode Montessori, qui formait des enseignants à Rome depuis 1928.
Refusant toute instrumentalisation, elle et son fils finissent par démissionner de leurs responsabilités. Elle déclare en ce sens : « Au-dessus de la politique, il y a l'enfant, c'est-à-dire l'humanité. » Elle est espionnée, menacée, et quitte le pays pour l'Espagne au printemps 1934 ; les principes montessoriens disparaissent alors immédiatement des écoles.
L'Espagne vit cependant les troubles opposant les partisans du général Franco et des communistes. De retour en Espagne, elle est intimidée devant son domicile par des anarchistes. Elle doit à nouveau fuir. Maria Montessori, qui n'a jamais été propriétaire d'un bien immobilier, se retrouve alors démunie.
L'une de ses élèves, Ada Pierson, avec laquelle elle se liera d'amitié et qui deviendra la seconde épouse de son fils Mario, l'invite à la rejoindre aux Pays-Bas. Maria Montessori s'y installe alors et crée l'association Montessori Publications.
L'intérêt pour Montessori existait en Inde depuis 1913, lorsqu'un étudiant indien a participé au premier cours international à Rome, et des étudiants sont revenus en Inde dans les années 1920 et 1930 pour créer des écoles et promouvoir l'éducation Montessori. La Montessori Society of India a été créée en 1926 et Il Metodo a été traduit en gujarati et en hindi en 1927. En 1929, le poète indien Rabindranath Tagore avait fondé de nombreuses écoles « Tagore-Montessori » en Inde et l'intérêt de l'Inde pour l'éducation Montessori était fortement représentée au Congrès international de 1929. Montessori elle-même est personnellement associée à la Société théosophique depuis 1899, date à laquelle elle devient membre de la section européenne de la Société - bien que son adhésion se termine par la suite. Le mouvement théosophique, motivé pour éduquer les pauvres de l'Inde, est attiré par l'éducation Montessori comme une solution.
En 1939, elle est invitée en Inde britannique, à Madras par la Société théosophique pour y donner une formation. Elle a alors 69 ans. Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, elle est surprise et assignée, avec son fils, à résidence en tant que ressortissante italienne et citoyenne d'un pays ennemi, à Kodaikanal, en Inde. Avec l'aide de son fils Mario, elle peut effectuer deux autres formations, et utilise ce temps pour continuer à développer la méthode pour les 6-12 ans. C'est à ce moment que le terme « éducation cosmique » a été introduit pour décrire une approche destinée aux enfants de cette sixaine. Il met l'accent sur l'interdépendance de tous les éléments du monde naturel. Les enfants travaillent directement avec les plantes et les animaux dans leur environnement naturel, et les Montessori développent des leçons, des illustrations, des tableaux et des modèles à utiliser avec des enfants d'âge élémentaire ainsi que du matériel pour la botanique, la zoologie et la géographie. Entre 1942 et 1944, ces éléments ont été incorporés dans un cours avancé adapté. Ce travail a donné lieu à deux livres : Education for a New World et To Educate the Human Potential. En 1944, les Montessori obtiennent une certaine liberté de mouvement et se rendent au Sri Lanka. En 1945, Montessori assiste à la première Conférence Montessori indienne à Jaipur.
En 1946, la guerre terminée, elle est de retour sur le « Vieux Continent » avec sa famille. Elle est accueillie partout avec les honneurs. Elle découvre avec stupeur, lors d'un voyage à Londres, accompagnée de son ancienne élève et traductrice anglaise Margaret Homfray, les dégâts causés par la guerre. À l'âge de 76 ans, Montessori retourne à Amsterdam et passe les six années suivantes à voyager en Europe et en Inde. Elle donne un cours de formation à Londres en 1946 et y ouvre en 1947 un institut de formation, le Centre Montessori. Après quelques années, ce centre devient indépendant de Montessori et continue sous le nom de St. Nicholas Training Centre. Toujours en 1947, elle retourne en Italie pour rétablir l'Opera Nazionale Montessori et donne deux autres cours de formation. L'Opera se voit confier pratiquement les mêmes tâches que dans le statut de 1924, dont la mise en ?uvre et le développement sont également favorisés par la revue Vita dell'infanzia, dont Maria a inspiré et déterminé la naissance en 1952. Plus tard dans l'année, elle retourne en Inde et donne des cours à Adyar et Ahmedabad. Ces cours ont donné lieu à la première édition anglaise du livre The Absorbent Mind (« L'esprit absorbant »), basé sur les notes prises par les étudiants pendant les cours. Montessori y décrit le développement de l'enfant à partir de la naissance et présente son concept des quatre plans de développement. En 1948, son livre Méthode de pédagogie scientifique appliquée à l'éducation des enfants dans les foyers pour enfants est à nouveau révisé et publié en anglais sous le titre The Discovery of the Child (« La Découverte de l'enfant »).
En 1949, elle donne un cours à Karachi, au Pakistan, et l'Association Montessori du Pakistan est fondée. La même année, Montessori retourne en Europe et participe au 8 Congrès international Montessori à Sanremo, en Italie, où une salle de classe modèle est présentée. La même année, le premier cours de formation pour les enfants de la naissance à trois ans, appelé Scuola Assistenti all'infanzia (« Ecole Montessori pour les assistants de l'enfance »), est créé.
Puis, elle rentre en Italie qui la réhabilite, mais elle préfère s'installer aux Pays-Bas, à Noordwijk aan Zee, où elle meurt d'une hémorragie cérébrale le 6 mai 1952 à l'âge de 81 ans, peu avant un voyage prévu en Afrique. L'inscription suivante a été écrite sur sa tombe : « Je prie les chers enfants, qui peuvent tout faire, de se joindre à moi pour construire la paix dans les hommes et dans le monde ».
Il existe une bibliographie Montessori très complète et articulée, mais certains ouvrages biographiques classiques sur l'érudite n'ont pas encore été traduits.