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Hannah Arendt
Hannah Arendt en 1958
Biographie
Naissance
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Hanovre, Empire allemand
Décès
(à 69 ans)
New York, États-Unis
Sépulture
Cimetière de Bard College (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Johanna ArendtVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
Prusse (-)
apatride (-)
américaine (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Domiciles
Berlin (à partir de ), New York (jusqu'en ), Königsberg, Hanovre, Heidelberg, Marbourg, Lindener Marktplatz 2 (Hanovre) (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Formation
Université Humboldt de Berlin (-)
Université de Marbourg (-)
Université de Heidelberg (doctorat) (jusqu'en )
Université de Fribourg-en-BrisgauVoir et modifier les données sur Wikidata
Activités
Philosophe, professeure d'université, sociologue, théoricienne politique, essayiste, écrivaine, politologue, historienne, résistanteVoir et modifier les données sur Wikidata
Conjoints
Günther Anders (de à )
Heinrich Blücher (de à )Voir et modifier les données sur Wikidata
Parentèle
Henriette Arendt (en) (tante)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
A travaillé pour
New School for Social Research (en) (à partir de )
Université de Chicago (-)
Jewish Cultural Reconstruction, Inc. (en) (-)
Schocken Books (en) (-)
Conference on Jewish Social Studies (en) (-)
The New Yorker
Brooklyn College
Université Columbia
Université de Californie à Berkeley
Université Yale
Université Northwestern
Université Wesleyenne
Université de PrincetonVoir et modifier les données sur Wikidata
Membre de
Académie américaine des arts et des lettres
Académie allemande pour la langue et la littérature
Académie américaine des arts et des sciencesVoir et modifier les données sur Wikidata
Mouvement
PhénoménologieVoir et modifier les données sur Wikidata
Maîtres
Martin Heidegger, Karl JaspersVoir et modifier les données sur Wikidata
Influencée par
Edmund Husserl, Karl Jaspers, Martin Heidegger, Edmund Burke, G. K. Chesterton, Montesquieu, Alexis de Tocqueville, Walter Benjamin, Hans Jonas, Jésus-Christ, Jean Duns Scot, Nicolas Machiavel, Platon, Karl Marx, Socrate, Franz Kafka, Augustin d'Hippone, Carl Schmitt, Paul de Tarse, Emmanuel Kant, Aristote, Søren KierkegaardVoir et modifier les données sur Wikidata
Distinctions
Liste détaillée
Bourse Guggenheim ()
Membre de l'Académie américaine des arts et des sciences ()
Prix Sigmund-Freud pour la prose scientifique ()
Médaille Emerson-Thoreau ()
Prix Sonning ()
Docteur honoris causa de l'université de PrincetonVoir et modifier les données sur Wikidata
Prononciation
?uvres principales
Les Origines du totalitarisme, Condition de l'homme moderne, Eichmann à Jérusalem, Essai sur la révolution, Rahel Varnhagen (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
signature de Hannah Arendt
Signature
Plaque commémorative sur le lieu d'inhumation au cimetière du Bard College, à Annandale-on-Hudson (État de New York).

Hannah Arendt, née Johanna Arendt le à Hanovre et morte le dans l'Upper West Side (New York), est une politologue, philosophe et journaliste allemande naturalisée américaine, connue pour ses travaux sur l'activité politique, le totalitarisme, la modernité et la philosophie de l'histoire.

Elle soulignait toutefois que sa vocation n'était pas la philosophie mais la théorie politique (« Mein Beruf ist politische Theorie »). C'est pourquoi elle se disait « politologue » (« political scientist ») plutôt que philosophe. Son refus de la philosophie est notamment évoqué dans Condition de l'homme moderne où elle considère que « la majeure partie de la philosophie politique depuis Platon s'interpréterait aisément comme une série d'essais en vue de découvrir les fondements théoriques et les moyens pratiques d'une évasion définitive de la politique ».

Ses ouvrages sur le phénomène totalitaire sont étudiés dans le monde entier et sa pensée politique et philosophique occupe une place importante dans la réflexion contemporaine. Néanmoins, certaines de ses thèses, comme le développement de la notion de Totalitarisme ont été vivement critiqués par certains historiens, à l'instar de Ian Kershaw. Ses livres les plus célèbres sont Les Origines du totalitarisme (1951 ; titre original : The Origins of Totalitarianism), Condition de l'homme moderne (1958) et La Crise de la culture (1961). Le mot totalitarianism exprime l'idée que la dictature ne s'exerce pas seulement dans la sphère politique, mais dans toutes, y compris les sphères privée et intime, quadrillant toute la société et tout le territoire. Son livre Eichmann à Jérusalem, publié en 1963 à la suite du procès d'Adolf Eichmann en 1961, où elle développe le concept de la banalité du mal, a fait l'objet d'une controverse internationale.

  1. ? (en) Kelsey Wood (Pulaski Technical College), « Hannah Arendt bio at Literary Encyclopedia », sur Litencyc.com (consulté le ).
  2. ? (de) « Entretien télévisé avec Günter Gaus, diffusé à la télévision allemande le 28 octobre 1964 ».
  3. ? Hannah Arendt, Essays in Understanding 1930-1954, New York, Harcourt, Brace & Co, 1994, p. 428.
  4. ? Arendt 1983, p. 285.
  5. ? Michelle-Irène Brudny, « Eichmann à Jérusalem ou la controverse interminable », Cités, vol. 67, n 3,‎ , p. 37?52 (ISSN 1299-5495, DOI 10.3917/cite.067.0037, lire en ligne, consulté le )

Biographie

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L'université de Heidelberg comme lieu d'étude et de rencontre dans les années 1920.

Vie et études en Allemagne

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Hannah Arendt naît à Hanovre en 1906. Son père, Paul Arendt, est ingénieur de formation et sa mère, Martha Arendt (née Cohn) pratique le français et la musique, ayant étudié trois ans à Paris. Elle grandit à Königsberg où sa famille est installée depuis plusieurs générations. Son grand-père, Max Arendt, est un des principaux hommes d'affaires de la ville, homme politique et un des chefs de la communauté juive de la ville. Sa tante, Henriette Arendt (en), est une des premières policières d'Europe. Sa famille maternelle, les Cohn, sont des importateurs de thé : l'entreprise familiale J. N. Cohn & compagnie est la plus importante fabrique de la ville. Tant sa famille paternelle que maternelle sont des Juifs laïcs assimilés, issus de l'empire russe.

Arendt passe ses premières années de vie à Linden (aujourd'hui Hanovre) où Paul Arendt travaille comme ingénieur dans une société d'électricité. Son père souffre toutefois de la syphilis et la détérioration de son état de santé les conduit à rejoindre leurs familles à Königsberg en 1909. Paul Arendt est hospitalisé à partir de 1911 en institution psychiatrique et meurt de la syphilis deux ans plus tard, alors qu'Arendt n'a encore que sept ans. L'expérience de la dégradation de l'état de santé de son père - qui ne la reconnaissait plus à la fin de sa vie - sera particulièrement marquante chez l'enfant.

À quinze ans, en 1921, Arendt lit la Psychologie des conceptions du monde de Karl Jaspers, son futur directeur de thèse, et s'intéresse dans la foulée à Søren Kierkegaard, auteur fondamental pour la philosophie de Jaspers.

En 1924, après avoir passé son Abitur ? équivalent allemand du baccalauréat français ou du diplôme d'études secondaires au Québec ? en candidate libre avec un an d'avance, elle étudie la philosophie, la théologie et la philologie classique aux universités de Marbourg, Fribourg-en-Brisgau et Heidelberg où elle suit les cours de Romano Guardini, de Martin Heidegger, d'Edmund Husserl puis de Jaspers. Elle s'y révèle d'une brillante intelligence et d'un non-conformisme encore peu commun.

Sa rencontre avec Heidegger en 1925 est un événement majeur de sa vie, tant sur le plan intellectuel que sentimental. Cet événement a toutefois souvent fait ombrage à la contribution originale de Arendt et occupe une place importante dans la compréhension de sa trajectoire intellectuelle. Arendt voue une grande admiration à Heidegger, de dix-sept ans son aîné. C'est le début d'une relation secrète (Heidegger est marié et père de deux enfants), passionnée et irraisonnée, qui laisse chez elle des traces durant toute sa vie, bien que Karl Jaspers ait été sa véritable figure d'influence intellectuelle. Après avoir interrompu leur relation, Arendt poursuit ses études à Fribourg-en-Brisgau pour devenir l'élève de Husserl, puis, sur recommandation d'Heidegger, à Heidelberg pour suivre l'enseignement de Karl Jaspers sous la direction duquel elle rédige sa thèse sur Le Concept d'amour chez Augustin. Quelle que soit la position ambiguë de Heidegger à l'égard du judaïsme et du nazisme, elle reste fidèle à leur relation et au souvenir du rôle de la pensée de Heidegger dans son propre parcours. Par-delà la guerre et l'exil, elle se fait l'infatigable promotrice du philosophe, aussi éminent que controversé, aux États-Unis.

En 1929, Hannah Arendt épouse Günther Stern (nommé plus tard Günther Anders), un jeune philosophe allemand rencontré en 1925 dans le milieu universitaire et devenu son compagnon en 1927. La même année, elle obtient une bourse d'études qui lui permet de travailler jusqu'en 1933 à une biographie de Rahel Varnhagen, une juive allemande de l'époque du romantisme (cet ouvrage ne paraîtra qu'en 1958). Avec la montée de l'antisémitisme et l'arrivée des nazis au pouvoir, elle s'intéresse de plus près à ses origines juives. Elle se rapproche dès 1926 de Kurt Blumenfeld, ancien président de l'Organisation sioniste mondiale, vitrine du mouvement sioniste, président de l'Union sioniste allemande depuis 1924 et ami de la famille. Chargée par Blumenfeld de recenser les thèmes de la propagande antisémite, elle est arrêtée en 1933 par la Gestapo et relâchée grâce à la sympathie d'un policier. Elle quitte l'Allemagne sur-le-champ.

Fuite hors d'Allemagne et exil aux États-Unis

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Arrivée en France en 1933, elle devient la secrétaire particulière de la baronne Germaine de Rothschild, milite pour la création d'une entité judéo-arabe en Palestine, participe à l'accueil des juifs, pour la plupart communistes, qui fuient le nazisme et contribue à faciliter leur émigration vers la Palestine. Divorcée en 1937, elle se remarie le avec Heinrich Blücher, un réfugié allemand, ancien spartakiste.

En , en raison de l'avancée éclair de l'Armée allemande en France, elle se retrouve internée par le Gouvernement français avec d'autres apatrides au camp de Gurs (Basses-Pyrénées). Dans la confusion qui suit la signature de l'armistice en , elle est libérée et parvient à s'enfuir à Montauban, où elle retrouve son mari. Puis elle gagne Marseille où elle obtient, grâce au Centre américain d'Urgence de Varian Fry, un visa pour le Portugal qu'elle rejoint en train. Elle vit alors quelque temps à Lisbonne dans l'espoir d'embarquer pour l'Amérique, ce qui est rendu possible en mai 1941, par l'intervention du diplomate américain Hiram Bingham IV, qui lui délivre illégalement un visa d'entrée aux États-Unis, en même temps qu'à environ 2 500 autres réfugiés juifs. À l'issue d'une traversée éprouvante, elle s'installe à New York. En situation de dénuement matériel, elle doit gagner sa vie et trouve un emploi d'aide à domicile dans le Massachusetts. Elle envisage un temps de devenir assistante sociale. Elle décide finalement de regagner New York, et y collabore à plusieurs journaux, dont l'hebdomadaire Aufbau.

Après la Seconde Guerre mondiale, elle retourne en Allemagne, où elle travaille pour une association d'aide aux rescapés juifs. Elle reprend contact avec Heidegger, témoignant en faveur du philosophe lors de son procès en dénazification. Elle renoue également avec le couple Jaspers dont elle devient une amie intime. En 1951, naturalisée citoyenne des États-Unis, elle entame une carrière universitaire comme conférencière et professeur invité en sciences politiques dans différentes universités : Berkeley, Princeton (où elle devient la première femme nommée professeur titulaire en 1959), Columbia, Brooklyn College, Aberdeen, Wesleyan.

En 1951, elle publie son livre Les Origines du totalitarisme, puis Condition de l'homme moderne en 1958, et le recueil de textes intitulé La Crise de la culture en 1961.

Le procès Eichmann, Chicago et la New School de New York

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Après ces trois livres fondamentaux, elle couvre à Jérusalem le procès du responsable nazi Adolf Eichmann, en qui elle voit l'incarnation de la « banalité du mal ». Les articles qu'elle écrit alors, réunis dans Eichmann à Jérusalem : Rapport sur la banalité du mal, publié en 1963, nourrissent une importante polémique. La même année, elle publie également Essai sur la révolution.

Son ami Gershom Scholem, spécialiste de mystique juive, polémique avec Arendt par lettres au sujet de la banalité du mal et d'autres thèmes.

À partir de 1963, elle devient titulaire de la chaire de sciences politiques à l'université de Chicago, avant d'être nommée professeur à la New School for Social Research (New York) en 1967, où elle restera jusqu'à sa mort. En 1966, elle apporte son soutien à la pièce de théâtre de l'Allemand Rolf Hochhuth, Le Vicaire, ?uvre qui déclenche une violente controverse en critiquant l'action du pape Pie XII face à la Shoah.

Dernières années

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En 1973, elle commence une série de conférences à Aberdeen sur « La pensée » et « Le vouloir » : elles constituent les deux premières parties de son livre posthume La Vie de l'esprit, dont elle n'a pas eu le temps d'écrire la troisième et dernière partie, « Juger ».

Elle meurt le à New York d'une crise cardiaque. Elle est enterrée au Bard College d'Annandale-on-Hudson, où son mari avait enseigné pendant de nombreuses années. Lors des obsèques, son ami Hans Jonas, après avoir prononcé le kaddish, lui dira : « Avec ta mort tu as laissé le monde un peu plus glacé qu'il n'était. »

  1. ? (en) Anne Conover Heller, Hannah Arendt : a Life in Dark Times, Houghton Mifflin Harcourt, (ISBN 978-0-544-45619-8)
  2. ? Marc de Launay, « Préface », dans Hannah Arendt, Qu'est-ce que la philosophie de l'existence ? suivi de L'existentialisme français, Paris, Payot & Rivages, (1 éd. 1994) (ISBN 9782743610326), p. 9.
  3. ? (en-US) « Eichmann in Jerusalem ?Hannah Arendt », sur The Abigail Adams Institute (consulté le )
  4. ? « À propos d'Hannah Arendt, et Heidegger ? », sur histoireetsociete, (consulté le ).
  5. ? « Hannah t'aime » (consulté le ).
  6. ? « Martin Heidegger et Hannah Arendt », sur republique-des-lettres.fr (consulté le ).
  7. ? Erreur de référence?: Balise <ref> incorrecte?: aucun texte n'a été fourni pour les références nommées Gaus
  8. ? Préface de J. Kohn à H. Arendt, Responsabilité et jugement, éd. Payot & Rivages, 2005 (p. 24, note 3).
  9. ? Meghann Cassidy, « Hannah Arendt à Paris (1933-1941) », Archives Juives, vol. 52,‎ , p. 97-110
  10. ? Actuelles Pyrénées-Atlantiques.
  11. ? Elisabeth Young-Bruehl (trad. de l'anglais), Hannah Arendt : biographie, Paris, Anthropos, , 717 p. (ISBN 2-7021-3037-2), p. 200.
  12. ? (en) « By the People Correspondence: Universities & Colleges, 1947-1975 (Woman of the World: Political Thinker Hannah Arendt) », sur crowd.loc.gov (consulté le )
  13. ? (en) Arendt Controversy, sur Yad Vashem.
  14. ? Michelle-Irène Brudny, « La polémique Scholem/Arendt ou le rapport à la tradition », Raisons politiques 3/2002 (no 7), p. 181-198. Lire en ligne.
  15. ? « Auteur : Hannah Arendt », sur La Procure (consulté le )
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